Extraits
du travail de recherche d’un logisticien
sur la logistique humanitaire. Merci à
lui de partager le fruit de son travail. Pour
plus d’informations sur le sujet, nous vous
invitons à prendre contact avec lui en
utilisant l’adresse e-mail suivante : logistique.humanitaire@hotmail.fr
Si
nous voulons comprendre les processus d’action
des ONG ainsi que les failles dans leur gestion,
il est nécessaire de se pencher plus en avant
sur leur fonctionnement logistique.
C’est
ce que nous allons faire dans la partie suivante
avec un survol des supply chain des ONG.
Étant
donné que toutes les ONG n’ont pas
une taille similaire et un degré de rationalisation
organisationnelle poussé, cette analyse ne
pourra être vraiment significative que pour
les plus grands acteurs du domaine associatif urgentiste,
comme les ONG que nous avions évoqué
précédemment.
-
Une approche par les flux
Qu’ils soient d’origine physique ou
immatérielle, de nombreux flux parcourent
la supply chain humanitaire. Afin d’en déterminer
les spécificités, nous allons la comparer
d’un point de vue macroéconomique à
celle du monde entrepreneurial. Ce travail nous
permettra de mieux situer la vision microéconomique
de la supply chain des ONG par rapport à
l’ensemble des acteurs du milieu.
Tout
d’abord, nous allons effectuer un survol des
flux dans la supply chain entrepreneuriale. On remarque
grâce à la figure 2.1 la complétude
des flux sur toute la relation fournisseur, organisation,
consommateur. En effet, deux flux sont en sens inverse
: le flux financier part du consommateur (ou actionnaire)
pour remonter à l’organisation qui
va elle-même payer les biens ou les services
à son fournisseur. En contrepartie de cet
avoir monétaire, celui-ci va lui offrir des
biens et des services que la firme va revendre (parfois
après transformation) aux consommateurs.
Parallèlement à ces échanges,
un flux informationnel important va lier les acteurs
les uns aux autres.
Fig.
2.1
Bien
que les acteurs soient très similaires, les
ONG connaissent des échanges de flux très
différents (cf. figure 2.2). Premier point
important, il n’y a pas de remontée
de la part du consommateur. Celui-ci va user des
biens et des services fournis, sans aucune contrepartie
quelle qu’elle soit. Dès lors, la relation
qui lie l’organisation et le consommateur
est unilatérale et très simple.
D’une façon analogue, la relation avec
les fournisseurs se réduit à sa forme
la plus simple, qui est la vente des biens et des
services en raison d’une contrepartie monétaire.
Il n’y a peu ou pas d’échange
informationnel entre ces deux parties.
Fig.
2.2
Là
où la différence est importante, c’est
au niveau des flux financiers. Alors que leur source
était multiple dans le cas des entreprises,
elle n’est qu’unique dans celui des
ONG. Leurs fonds (sous forme monétaire ou
matérielle) proviennent uniquement des donateurs
(de sources diverses) et aucunement d’une
activité lucrative. Dès lors, les
ONG auront un devoir informationnel envers ces donateurs
et bailleurs, notamment sur la façon dont
sont dépensés leurs dons. Cela implique
la mise en place d’une supply chain
quelque peu particulière car intégrant
un système de tracing et tracking
particulièrement précis (surtout compte
tenu des conditions dans lesquelles il sera utilisé)
afin de garantir une transparence aux donateurs.
-
Présentation de la supply
chain humanitaire
Une fois que nous avons vu cet aspect macroéconomique
et les différents flux qui traversent la
supply chain humanitaire, il serait intéressant
de se pencher sur son fonctionnement en détail.
Pour chacun de ses maillons, nous allons essayer
de comprendre en quoi il consiste, quelles sont
ses spécificités mais aussi quelle
est sa concrétisation opérationnelle
à travers des exemples concrets de gestion
de crise. Cette vision microéconomique nous
permettra de mieux comprendre quels sont les leviers
d’actions des ONG ainsi que les points d’amélioration.
La
logistique humanitaire peut être définie
comme étant la fonction en charge d’assurer
un flux de biens et des services efficaces et efficients
dans le but d’alléger les souffrances
des personnes rendues vulnérables par la
suite d’une crise[1]
. Elle comprend donc la gestion des différents
flux (aussi bien matériels, financiers qu’informationnels)
ainsi que les fonctions de stockage et distribution.
La logistique humanitaire, à l’instar
de la logistique entrepreneuriale, a pour finalité
de livrer les bons biens aux bonnes personnes, au
bon endroit, au bon moment et dans les bonnes quantités.
D’autant plus de contraintes quand on prend
en compte l’importance des programmes de secours.
Étant internationaux, les programmes d’action
nécessitent des transports multimodaux comprenant
des opérations de douanes qui peuvent être
complexes car elles portent sur des quantités
énormes de marchandises vers des lieux sinistrés.
Ces opérations logistiques sont complexifiées
par des contraintes financières souvent restrictives
qui ne peuvent être dépassées.
Il s’agit donc de maximiser l’action
humanitaire tout en respectant le budget disponible.
D’autant plus de challenges qui pèsent
sur l’organisation de la supply chain
des ONG et qui les forcent à se professionnaliser
de plus en plus.
À l’image de la supply chain
entrepreneuriale, celle du domaine humanitaire regroupe
les grands postes de la logistique classique. A.
Thomas, dans son analyse de la chaine logistique
humanitaire des ONG[2]
, propose la formulation suivante :
Nous
remarquons que nous retrouvons tous les grands postes
de la supply chain entrepreneuriale. Nous allons
maintenant les présenter afin d’en
avoir une vision complète. Dans certains
cas nous allons illustrer cette vision théorique
par une présentation de la façon dont
elle se concrétise dans l’ONG Action
Contre la Faim.
Voir
également
[1]
Anisya
S. Thomas et Laura Rock Kopczak (2005), From Logistics
to supply chain management: the path forward in
the humanitarian sector, Fritz Institute.
[2]
Anisya Thomas, Humanitarian Logistics :
Enabling Disaster Response, Fritz Institute.
Quelques
livres sur le sujet
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Une
histoire de l’humanitaire
de Philippe Ryfman
Présentation
de l’éditeur
Trop de visions segmentées
occultent la réalité complexe
de l’humanitaire - facteur déterminant
pourtant de la survie et du rétablissement
de la dignité de millions de personnes
et lieu de l’engagement de centaines
de milliers d’autres. Pour la saisir,
de même que ses enjeux et frontières,
il faut revisiter d’abord sa généalogie.
Puis en montrer les émergences successives,
les transformations et mutations progressives
et les dynamiques à travers ses acteurs
non gouvernementaux ou publics, avec le
recul de bientôt un siècle
et demi d’existence. Plutôt
que de s'inscrire dans une simple linéarité
chronologique, la démarche se veut
à la fois panoramique et prospective,
afin de penser le présent à
partir d’éléments historiques.
Dans un contexte international marqué
par la globalisation et l’anomie,
les conflictualités et les risques
climatiques ou de catastrophes naturelles
survenant sur une planète de plus
en plus urbanisée et peuplée,
les besoins humanitaires ne devraient en
effet pas décroître.
L'auteur
vu par l’éditeur
Philippe Ryfman est professeur et chercheur
associé au Département de
science politique et au Centre de recherches
politiques de la Sorbonne (Université
Paris-I-Panthéon-Sorbonne). Egalement
avocat, il a dirigé le Master "Coopération
internationale, action humanitaire et politiques
de développement ". Il a notamment
publié Les ONG (" Repères
", 2004), contribué à
divers ouvrages collectifs et assuré
la chronique a Société civile
" du Monde-Economie.
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Les
ONG de
Philippe Ryfman
Présentation
de l’éditeur
Les organisations non gouvernementales (ONG)
sont très présentes dans l’actualité
mondiale, mais finalement assez mal connues.
Les dénonciations caricaturales alternant
avec les hagiographies sans nuances n'en
facilitent pas l’analyse. D'autant
que, si une abondante littérature
sur les ONG existe, la recherche demeure
encore lacunaire. Ce livre s'attache donc,
après avoir montré l’inscription
des ONG dans une histoire déjà
longue, à souligner l’ambiguïté
du concept, laquelle n'est nullement contradictoire
avec un fort activisme. Il s'efforce de
répondre aux principales questions
les concernant : financement, sociologie,
gestion, management, valeurs, identité
collective, concurrence, professionnalisation,
légitimité, gouvernance, place
dans la " société civile
" et relations internationales. Enfin,
si la montée en puissance des ONG
du Sud et des pays émergents symbolise
une planétarisation - que traduit
aussi l’émergence d’une
diplomatie non gouvernementale - de ces
acteurs au sein d’un monde globalisé
mais en crise, ils sont désormais
en butte à l’hostilité
sourde d’un nombre croissant d’États.
L'auteur
vu par l’éditeur
Philippe Ryfman est professeur et chercheur
associé au Département de
science politique et au Centre de recherches
politiques de la Sorbonne (université
Paris-I). Également avocat, il a
dirigé le master "Coopération
internationale, action humanitaire et politiques
de développement ". Il a notamment
publié " Une histoire de l’humanitaire
" ("Repères", 2008),
contribué à divers ouvrages
collectifs et assuré la chronique
"Société civile"
du " Monde-Économie ".
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L'idéologie
humanitaire. ou, Le spectacle de l’altérité
perdue de
Bernard Hours
Présentation
de l’éditeur
L'action humanitaire a produit en quelques
années une idéologie cohérente
qui permet de penser de façon homogène
le destin des victimes des catastrophes,
tant naturelles que politiques. C'est à
travers la médecine humanitaire,
en particulier, que cette mondialisation
de la gestion des Autres est désormais
tellement ritualisée par les médias
qu'elle est devenue un sentiment virtuel,
un élément de correction morale
universelle. En fait, l’idéologie
humanitaire se présente comme la
facade éthique des nouvelles formes
d’exploitation économique.
Elle sert d’abord à rendre
acceptable l’iniquité en attirant
le regard sur les seules victimes spectaculaires.
L'auteur
vu par l’éditeur
Bernard Hours, anthropologue (Institut Français
de Recherche Scientifique pour le Développement
en Coopération) a mené, au-delà
de ses travaux sur les relations entre le
politique et le religieux (Laos, Vanuatu),
et sur les systèmes de santé
(Laos, Cameroun, Bangladesh, Vietnam), une
réflexion de longue durée
sur L'évolution de l’idéologie
du développement et l’action
humanitaire. Celle-ci s'est nourrie d’une
expérience concrète de responsable
d’ONG médicale et de dix ans
de recherches de terrain
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Le
dispositif humanitaire : Géopolitique
de le générosité d’Emil
Cock
Présentation
de l’éditeur
Les médias associent généralement
le système humanitaire à des
institutions caritatives responsables de
secourir les populations en détresse
des pays en voie de développement.
Mais ces institutions ne constituent qu'un
maillon d’un système beaucoup
plus large impliquant un nombre d’acteurs
agissant dans l’ombre. L'auteur analyse
les mécanismes de ce dispositif humanitaire
complexe dont le public et les volontaires
sont souvent mal informés. Son analyse
se base à la fois sur son expérience
de terrain auprès de Médecins
sans frontières et Médecins
du monde et sur un examen détaillé
d’un grand nombre de documents officiels
de sources variées. Il dégage
les liens entre le dispositif humanitaire
et les sphères politiques, économique
et militaire. Ce livre ouvre les yeux sur
les enjeux réels de la générosité
occidentale en identifiant son origine,
ses rouages et son rôle dans la géopolitique
actuelle.
L'auteur
vu par l’éditeur
Emil Cock est médecin, diplômé
de l’Institut Universitaire d’Etudes
du Développement (IUED) à
Genève, collaborateur du Programme
interdisciplinaire de l’action humanitaire
(PIAH) de l’Université de Genève.
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Souvenir
d’un Tsunami Humanitaire de
Christophe Charbon
Présentation
de l’éditeur
Le 26 décembre 2004, un tsunami ravage
les côtes de 4 pays d’Asie et
atteint au total 14 pays différents,
provoquant la mort de 226 000 personnes.
L'émoi est mondial. En écho
à cet événement, une
réaction brusque va apparaître,
celle de la gestion humanitaire la plus
chaotique de tous les temps. Pour la première
fois, un consultant de l’ONU, présent
sur les lieux du désastre pendant
un an et demi, brise de nombreux tabous
et nous présente une analyse méticuleuse
du mécanisme humanitaire face à
ce type de circonstance. Ce récit
nous livre également une foule d’enseignements
sur les désordres que provoquent
désormais les systèmes de
charité en provenance des pays riches.
Christophe Charbon nous propose aussi une
analyse historique passionnante en comparant
la gestion du tsunami de 2004 à l’aune
de la gestion des catastrophes à
travers l’histoire.
L'auteur
vu par l’éditeur
Christophe Charbon est un agronome belge,
né en 1970. Il effectue depuis 8
ans des missions pour différentes
organisations internationales dans des pays
en guerre, dans des situations post-conflit
ou dans des pays atteints par un désastre
naturel. Consultant international, il fut
dans le cadre du tsunami vice-coordinateur
de la FAO à Aceh en Indonésie
pendant 9 mois avant d’être
affecté à Bangkok durant 6
mois en tant que coordinateur des projets
agricoles pour les pays les plus touchés
par le tsunami.
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Voyage
au bout de l’humanitaire de
Marc Vachon et François Bugingo
Présentation
de l’éditeur
Voici une histoire vraie. Marc Vachon naît
à Montréal, en 1963. Abandonné
à la naissance, ballotté d’un
foyer à l’autre, il connaît
tout ce que la vie dans nos pays "
développés " offre de
plus terrible : la violence, l’abus,
le vide. Il y oppose l’évasion,
la drogue, le crime. Il devient un "
pourri "... jusqu'au jour où
il découvre par hasard à Paris
l’existence de Médecins sans
frontières (MSF). Puisqu'il a quelques
connaissances dans la construction, on l’engage
pour veiller à la logistique d’un
camp au Malawi. Dès lors, une autre
vie commence : il met au service de cette
cause l’instinct de survie qu'il a
acquis dans la rue. Il se rend indispensable
et, très vite, devient le logisticien
de choc de MSF. Celui qui peut déplacer
des montagnes, celui qui n'a peur de rien
ni de personne, celui qui peut construire
des abris pour des dizaines de milliers
de réfugiés en un temps record
devient un aventurier. Il prend un malin
plaisir à falsifier des papiers pour
passer des camions en contrebande à
la frontière kurde, et se livre au
trafic des Harley Davidson à Bagdad.
" Mais au lieu d’être un
chevalier noir sur une Harley noire à
Montréal, j'étais un chevalier
blanc sur une Harley blanche en Irak. "
Les missions se succèdent l’Irak,
après la première guerre du
Golfe, le Mozambique, le Soudan, Sarajevo,
le Rwanda, où il assiste aux préparatifs
d’un génocide. Il découvre
que l’humanitaire est aussi un lieu
où s'exerce le pouvoir. Son récit
l’amène ainsi à livrer
une critique décapante des dérives
de l’humanitaire à l’âge
de l’information-spectacle. Ce livre,
écrit en collaboration avec le journaliste
François Bugingo, raconte une victoire
personnelle sur le destin et un combat inachevé
contre l’injustice. C'est l’histoire
d’un héros d’aujourd’hui,
comme il y en a trop peu.
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Ressources complémentaires
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Frets
aériens et corridors humanitaires :
retours d’expérience suite au tremblement
de terre à Haïti
Le 12 Janvier 2010, un séisme
de magnitude 7 sur l’échelle
de Richter secoue gravement la région
métropolitaine de Port-au-Prince,
détruisant 80% des écoles.
80% des habitations sont endommagées.
La coopération américaine
évalue le nombre de blessés
à 300 000, et des dizaines de
milliers de personnes se retrouvent
sans abris. Lorsque la secousse a lieu,
il est 17h00 locale, et à cette
heure-là, les familles sont «
éclatées » ; l’un
des deux parents est au travail, les
enfants sont à l’école.
Ceux qui ont de la famille ailleurs
que dans la capitale partent à
pied dans le reste du pays. Pour ceux
qui restent, les habitants dorment dans
la rue sous des abris de fortune occupant
le moindre carré d’herbe
disponible, ou montant des tentes dans
les rues de peur de revenir dormir dans
leurs maisons endommagées. Les
administrations sont à terre
: du Ministère de la Justice
ne reste que le fronton du bâtiment
; des papiers administratifs volent
partout. Il n’y a plus de douanes.
L’hôtel qui hébergeait
les Nations-Unies s’est effondré
sur lui-même, tuant la plupart
des personnels de l’organisation.
Le palais présidentiel est partiellement
effondré.
Le
soir de la secousse, beaucoup d’haïtiens
se dirigent vers les structures de
santé qui sont restées
debout : à l’hôpital
de Choscal65, disposant de deux blocs
opératoires, sur 400 personnes
attendant d’être opérées
le soir du 12 Janvier, seules 50 ont
pu être sauvées par MSF
Belgique, dont les chirurgiens opéraient
à la lumière des phares
des voitures.
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