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Magazine FLOW n° 24 - Le Cluster à la rencontre des ports belges

LE PORT DE ZEEBRUGGE

A Zeebrugge, nous sommes reçus par Miel Vermorgen, directeur commercial et logistique, qui nous présente le port avant de nous le faire visiter et rencontrer un des opérateurs logistiques majeurs en Short Sea, la société ECS (Monsieur Jef Huyben, directeur commercial, et Madame Caroline Reynaert, responsable de plateforme).


  • Un port en récente expansion

Zeebrugge, ou Bruges-sur-Mer, se situe en bordure du littoral de la Mer du Nord, au coeur du range portuaire nord européen, sur la route maritime la plus fréquentée au monde. Cette localisation géographique est un atout non seulement pour les échanges européens, avec les Iles britanniques, les voisins nord-européens, la Scandinavie, la Russie mais aussi, via la Manche, pour les échanges sudeuropéens et avec les continents plus lointains.

C’est seulement en 1985 que le port acquiert sa structure actuelle :

  • L’avant-port, construit sur des terrains gagnés sur la mer et protégé par deux jetées de plus de 4 kilomètres, grâce à l’accès maritime direct et à la profondeur du chenal, est particulièrement approprié aux trafics conteneur et roulier mais accueille aussi un terminal gazier ainsi que des services annexes (purges…);
  • L’arrière-port abrite le bassin Nord (14 m de profondeur) et le bassin sud (18,5 m), accessibles par l’écluse Pierre Vandamme, qui accueillent des terminaux rouliers, de vrac, de conventionnel, un pôle alimentaire et une zone d’activité de distribution orientée vers la logistique ;
  • Le port de Bruges, accessible par le canal Baudouin, spécialisé dans le traitement de matériaux de construction et de vracs solides et accueille aussi de l’activité industrielle.

En effet, jusqu’en 1965, le port de Zeebrugge est un petit port qui traite environ 2 millions de tonnes de marchandises par an. Néanmoins, à compter des années 1970, l’émergence des techniques de rouliers, la conteneurisation et l’augmentation de l’échelle des navires convainquent le gouvernement belge d’investir dans ce port côtier en eaux profondes.

Si en 1980, les trafics conteneurisé et roulier totalisent 45% du tonnage (soit 6.3 millions de tonnes) la prépondérance reste au vrac solide et surtout liquide, notamment du pétrole brut acheminé par oléoduc vers la raffinerie Texaco de Gand, dont la fermeture en 1982, conjuguée à la crise du pétrole, impactera d’ailleurs fortement le trafic du port.

1985 marque le début de l’expansion du port avec les contrats de gaz liquéfié passés avec l’Algérie mais déjà une belle diversification puisque sur 14 millions de tonnes de trafic, le conteneur apporte 16% du total et le Ro-Ro 54%. C’est en 2003 que le conteneur devient le premier trafic avec 40 % du tonnage devant le Ro-Ro à 36 %.


  • Ses activités

Zeebrugge est un port polyvalent qui, outre les trafics rouliers des ferries européens, est positionné dans le transport intercontinental de conteneurs, les trafics feeder (20 départs journaliers en SSS), les chargements conventionnels, le gaz naturel liquéfié et même les paquebots de croisière (attractivité de Bruges et tirant d’eau). A noter aussi que Zeebrugge est leader mondial pour la manutention de voitures neuves.

Zeebrugge est un port polyvalent qui, outre les trafics rouliers des ferries européens, est positionné dans le transport intercontinental de conteneurs, les trafics feeder (20 départs journaliers en SSS), les chargements conventionnels, le gaz naturel liquéfié et même les paquebots de croisière

Le port offre chaque jour en moyenne 25 départs européens, principalement vers le Royaume-Uni, mais de plus en plus aussi vers la Scandinavie, la région de la mer Baltique et l’Europe du Sud. Grâce à la combinaison de services intercontinentaux et des connexions avec l’arrière-pays, Zeebrugge se positionne aussi comme une plateforme logistique ayant vocation à accueillir les centres de distribution d’entreprises internationales et, conjointement, leurs unités de production dédiées à l’ajout ultime de valeur avant distribution à l’ensemble de l’Europe.
Un projet prévoit la transformation de l’écluse Visart (vers le Canal Boudouin qui serait élargi) en un chenal navigable de 70 à 90 m de largeur et 10 m de profondeur afin de rendre utiles 340 ha de terrain.



  • L’accueil des plus gros porte-conteneurs

Le trafic conteneur, qui a atteint 2,2 millions d’EVP en 2011 (1,3 M de boites ; -12 % environ par rapport à 2010), représente 48 % du total du tonnage maritime traité par le port. Pour les trafics continentaux, le 45’ est l’unité de base : il permet des gains de manutention, de stockage (deux hauteurs sur MAfisurbaissées) et surtout de coût de passage (facturation au mètre linéaire).
Les infrastructures de Zeebrugge et son positionnement lui permettent d’être le port d’escale de grands armateurs type CMA-CGM (qui possède 35 % d’un des terminaux d’APM) ou Maersk pour leurs services intercontinentaux (un départ journalier en moyenne vers le Moyen Orient et l’Extrême Orient) et européens. Le port propose 11 départs par semaine sur le shortsea, vers le Royaume-Uni (la prépondérance des marchandises passant à Zeebrugge à destination de l’Angleterre en a fait, en quelque sorte, le 49ème County of England !), les pays scandinaves, la Russie.

Zeebrugge possède trois grands terminaux de conteneurs :

  • le ‘Container Handling Zeebrugge’ (PSA Zeebrugge) : situé sur un espace de 45 hectares connectés fer, il dispose d’une longueur de quai de 1.925 m et d’une profondeur de 15 m et peut traiter avec 8 portiques jusqu’à 1,1 MEVP ; il va faire l’objet de 25 M€ d’investissements (subventionnés à 20 % par la Région flamande) afin de voir accroître sa profondeur à 16 m et rénover son quai ;
  • le ‘APM Terminals Zeebrugge’ : ce terminal occupe 57 hectares reliés au fer et offre une longueur de quai d’1 km pour une profondeur de 16 m. Ses 7 portiques Super Post Panamax peuvent traiter jusqu’à 850.000 EVP ;
  • le ‘Zeebrugge International Port’ (ZIP), datant de fin 2010, opéré par PSA, peut accueillir les plus grands porte-conteneurs de la classe Emma Maersk et Triple E Class (18.000 EVP). Quatre portiques sont opérationnels (500.000 EVP) mais il est prévu qu’il puisse à terme manutentionner jusqu’à 3 MEVP sur 90 ha.

D’autres terminaux (tels que les rouliers et fruitiers) sont équipés pour la manutention de conteneurs pour les connexions avec des bateaux d’outre-mer ou afin de traiter le trafic shortsea comme CdMC.

En effet, Zeebrugge se positionne désormais en un véritable hub pour conteneurs car la course au gigantisme des porte-conteneurs implique que la plupart des cargaisons soient rapidement éclatées (Slow Steaming) à partir de leurs quelques ports d’escales vers leur destinadestination finale (Royaume-Uni, Europe du nord et du sud) via l’utilisation de plus petits navires ou feeders maritimes ou l’hinterland en empruntant la route, par train-bloc, barge et barge estuaire.


  • Le trafic Ro-Ro

Le port de Zeebrugge manutentionne un volume annuel de 13,1 MT de marchandises conventionnelles en roulier, ce qui le classe en tête des ports européens pour le fret non accompagné. Zeebrugge s’est en effet fortement spécialisé dans le transport de remorques non accompagnées (1 million de remorques bâchées) et, depuis une dizaine d’années, dans celui du conteneur de 45’, éventuellement ouvrable par le côté. D’ailleurs les ferries accostant à Zeebrugge (comme à Rotterdam) sont spécialement adaptés pour offrir une hauteur permettant de gerber ce type de conteneurs sur 2 hauteurs (7m).

Le port dispose de 23 postes d’amarrage pour les navires rouliers, ce qui représente une capacité totale de chargement et de déchargement de 3.500 camions toutes les 24 heures, soit plus d’un million par an. 13 services fixes vers 14 ports différents du Royaume-Uni, avec jusqu’à 20 départs par jour, dont sept vers Londres sont proposés. Les autres services comprennent la navigation de ligne vers la Scandinavie et les pays du sud de l’Europe, comme l’Espagne et le Portugal, et plus loin, vers la Turquie.

Avec 1,74 million d’unités, un produit se démarque : celui des voitures neuves qui classe Zeebrugge au premier rang mondial devant Bremerhaven (1.6 million en 2010). Ce segment a augmenté de plus de 8 % entre 2010 et 2011.

Le port de Zeebrugge concentre en effet les véhicules en provenance des sites de production d’Europe du Nord (Grande Bretagne, Belgique, France, …) du Sud (péninsule ibérique, Turquie) d’Asie, d’Afrique (Afrique du Sud), d’Amérique pour les redistribuer en Europe, Amérique, Asie-Océanie. Le trafic de véhicules neufs a pris son envol dans les années 90. Ainsi, entre 1990 et 2011, le trafic est passé de 210 000 véhicules à presque 2 millions.

Avant leur mise sur le marché, les véhicules neufs font l’objet d’opérations logistiques (stockage, contrôles, personnalisation notamment quand il y a des grandes campagnes de promotion avec des options en pack). Quatre centres fournissent ce contrôle de qualité et des services préalables à la livraison. Ce qui présente pour le port l’avantage « d’ancrer » ce trafic sur le site et crée de nombreux emplois. Ces centres logistiques, dont certains dédiés aux pièces de rechange, sont gérés par les constructeurs - Toyota par exemple - ou par les armateurs qui ont développé des prestations logistiques. C’est le cas de Wallenius Wilhelmsen Logistics qui, au-delà de son activité maritime deepsea, s’occupe de la desserte terrestre finale, en modes routier, ferroviaire, fluvial, ou par feeder.

Sont spécialisés dans le trafic automobile et offrent au total une capacité de stockage de 175.000 voitures neuves sur 300 ha :

  • les terminaux de Sea-Ro (dont 2 sur l’avant-port), société ayant fait récemment construire un parking à quatre niveaux (50,4 x 326 m par niveau) afin, à la fois d’économiser de la surface au sol mais aussi d’offrir à ses clients (Mercedes) une meilleure protection de ses véhicules ;
  • le terminal de Wallenius Wilhelmsen Logistics Zeebrugge, qui peut stocker 22.000 voitures et propose un service couvrant l’intégralité de la chaîne plus le PDI (Pre Delivery Inspection) et PPO (Post Production Option) : réparations, modifications et inspections vieillissement, lavage, peinture… ; ce, pour les véhicules neufs ou d’occasion ;
  • les deux terminaux d’International Car Operators (ICO). En avril 2011 cet opérateur a remporté un appel d’offres pour la manutention et l’inspection d’un volume annuel de 15.000 véhicules Mazda destinés à la Russie, Norvège, Suède et Finlande ; ¦ le terminal de CdMZ (C.Ro) de 87 ha intégrant un centre de PDI et traitant aussi des gros engins tels des machines agricoles (assemblage) ;
  • le terminal de Toyota, implanté depuis 2011, qui reçoit la majorité des véhicules (Toyota et Lexus) à destination de l’Europe occidentale. Des 2.000 voitures traitées quotidiennement, une partie est distribuée directement vers le réseau en Belgique, aux Pays-Bas et au Grand-Duché de Luxembourg. Les autres véhicules repartent et sont exportés vers la Grande-Bretagne, l’Espagne, le Portugal, la Norvège, la Finlande, la Suède, la Grèce et l’Italie. En mars 2011, cette implantation a fêté la réception de son 3 millionième véhicule.

L’avant-port accueille les terminaux Ro-Ro de P&O Ferries, DFDS Seaways (3 départs hebdomadaires pour l’Ecosse), et le terminal PSA Zeebrugge-Wielingen PSA par lequel transitent 2 millions de tonnes de produits forestiers.


  • Pondéreux et vracs liquides : de beaux restes

Le vrac solide (1,7 MT) est principalement constitué de matériaux de construction comme le sable et le gravier. Sont également transbordés des céréales, de l’alimentation animale et des engrais.
Quant au vrac liquide (8,3 MT), il s’agit principalement du gaz naturel liquéfié (GNL), de produits pétroliers et de mélasse (Tate&Lyle).
Le gaz naturel liquéfié est, entre autres, importé du Qatar. Dans le terminal gazier de Fluxys (avant-port), qui peut accueillir des navires jusqu’à 266.000 m3, il retrouve une forme gazeuse pour le marché belge. De plus, des champs de gaz norvégiens et britanniques sont reliés à Zeebrugge par gazoducs. Avec ces installations, le port de Zeebrugge alimente 15 % du marché du gaz européen et traite annuellement 40 milliards de m3.
Les travaux de constructions d’une nouvelle jetée, destinée à accueillir des navires gaziers plus petits et des trafics shortsea, ont commencé en 2011 et devraient s’achever en 2014.


  • Marchandises conventionnelles : des niches à développer

Le trafic conventionnel engendrant beaucoup d’emplois (pour le stockage, la gestion des stocks, le traitement, l’emballage et le regroupement des produits), de nombreuses entreprises situées dans l’arrière-port se spécialisent dans des marchés de niche. Néanmoins ce trafic est soumis à une forte concurrence du conteneur, éventuellement ‘reefer’ (réfrigéré) pour les produits alimentaires frais. Le Zeebrugge Breakbulk Terminal géré par ICO et Rhenus Holding est opérationnel depuis l’automne 2010 et traite des produits du bois, d’acier, d’agriculture et des charges conventionnelles.

Au sein de ce type de marchandises, on peut distinguer certains secteurs comme :

Les denrées périssables

En tout, le port dispose d’environ 900.000 m3 de stockage à température contrôlée dont 345.000 m3 de surgelés, 270.000 m3 de réfrigérés et 287.000m3 de froid positif. Il met aussi à disposition des opérateurs 1200 prises pour des conteneurs reefers (Source : Lloyds, novembre 2011).
SEA-Invest dispose dans l’arrière port de 3 terminaux, totalisant 132.000 m³ de stockage pour les produits surgelés (-20 ° C – 12.000 palettes), et traite aussi légumes, fruits (kiwis et bananes), poissons, viandes et jus de fruit. SEAInvest réalise notamment pour le compte de Zespri (producteur néo-zélandais) l’emballage de 120.000 T de kiwis destinés à l’Europe entière.
Tropicana a implanté une usine de traitement et de conditionnement de 35.000 m2 (investissement d’environ 50 M €) qui reçoit des cargaisons en vrac de jus de fruits en provenance du Brésil et de Floride, via le Carlos Fischer, et a redistribué en 2011 plus de 232 millions de litres de jus de fruits frais vers les marchés européens, principalement le Royaume-Uni (90 %).

Même si le centre de pêche est plutôt en déclin, compte tenu de la hausse des importations en provenance d’Extrême- Orient un complexe destiné au débarquement, commerce et traitement du poisson frais a été développé dans le « European Food Center » et de l’espace a été réservé pour une criée. Est présent sur le port la société Marine Harvest, premier producteur de produits marins (élevage de saumons) dont les entrepôts à Zeebrugge assurent la préparation, le conditionnement de poissons frais ou surgelés ou fumés, leur étiquetage par marques et leur logistique. L’entreprise 2XL centralise, elle, des vins de toute l’Europe ainsi que, pour le compte de Danone, l’eau minérale Evian (arrivant par train) et expédie le tout en Angleterre.
Afin de développer encore les trafics alimentaires, le port a construit puis mis en location un nouveau poste d’inspection frontalière (PIF) très largement dimensionné qui permet que soient effectués tous les contrôles en un même point.


La pâte à papier, l’acier

Parmi les sociétés installées dans le port de Zeebrugge, le centre de distribution StoraEnso, traite près de deux millions de tonnes de produits forestiers par an :
- La pâte à papier (250 / 300.000 T) est importée du Brésil et exportée vers la Scandinavie ;
- Le papier et ses dérivés sont reçus par bateau de Göteborg, via des conteneurs spéciaux pouvant transporter jusqu’à 80 T de chargement, et après stockage sur une plate-forme automatisée, sont expédiés dans toute l’Europe dans des trains spécialement conçus à cet effet.


  • Les croisières

Zeebrugge, grâce notamment à l’attractivité de Bruges, ville reconnue comme patrimoine mondial par l’UNESCO, et à sa bonne accessibilité maritime, est devenu aussi un port de croisière qui a accueilli, en 2011, 75 escales (629.473 mouvements de passagers). Un terminal dédié à cette activité sera d’ailleurs ouvert en 2013.


  • Attirer les centres logistiques européens de distribution

Selon notre interlocuteur, la position de Zeebrugge sur le Short Sea Shipping est en partie due à un choix stratégique de certains logisticiens anglais avec le déplacement d’une zone de distribution d’Angleterre à Zeebrugge (la T.Z.Z).

Grâce au saut de nuit (temps masqué en terme logistique), Zeebrugge se trouve en effet proposer un emplacement plus compétitif que certaines implantations insulaires pour la desserte de l’ile elle-même. De ce fait, de nombreuses entreprises de transport, dans et aux alentours du port, se sont spécialisées dans le transport vers le Royaume-Uni, comme ECS (European Container Services, voir encadré), Middlegate Europe et 2XL qui assurent le transport pour des chargeurs tels que Procter & Gamble, Lidl et Wallmart.

Dans le sillage de la T.Z.Z. et en dehors des sociétés déjà mentionnées (StoraEnso, Tropicana, Toyota), Zeebrugge a encouragé l’implantation de zones logistiques, telle que la Zone Maritime Logistique (MLZ – 120 ha dont 20 ha déjà réservés pour Nespresso), et souhaite attirer des centres de distribution à vocation européenne, pour autant qu’ils utilisent pour leurs importations ou exportations le port. Le port accueille ainsi le centre de distribution européen de Bridgestone Europe, qui dispose d’un entrepôt de 120.000 m2 et traite 10 millions de pneus par an pour les voitures, camions et engins industriels et agricoles.

SeaPark organise la distribution mondiale de machines agricoles (Case New Holland et Caterpilar). Le marchand de café Efico importe du café vert qui, après manutention et stockage (capacité 450.000 sacs soit 40 % de la consommation belge) par Seabridge, est distribué vers les différentes usines de torréfaction en Europe.


  • Multimodalité

Multimodalité Zeebrugge


Une faiblesse – relative – de Zeebrugge réside dans les connexions avec son hinterland qui restent perfectibles. D’où un effort particulier pour développer une offre de services en ce sens avec, notamment, la reprise par l’autorité portuaire d’une société de transport multimodal (avec participation privée) afin de de développer le report modal sur les modes massifiés (fluvial et ferré).
En matière de pré/post acheminements, 54% des marchandises utilisent le mode routier, 16% le rail (cette part s’élève même à 40 % pour le trafic de conteneurs), 14 % sont à nouveau transbordées sur des navires maritimes (Short Sea Shipping), 11% passent par pipelines, 4 % passent par la route maritime à courte distance jusqu’à l’estuaire de l’Escaut, avec les barges estuaires et seulement 1 % utilisent directement le fluvial.

Intérêt du transbordement maritime pour de la courte distance

Jef Huyben de la société ECS donne un exemple concret du SSS : le passage à destination de Rosyth (nord de l’Angleterre) reviendrait à 1.100 € en bateau alors qu’il faudrait compter 1.500 € par la route une fois débarqué dans le sud-ouest de l’Angleterre.

La prédominance de la route

Hors transbordement maritime, la route atteint 63 % des pré/post acheminements (jusqu’à environ 250 km) alors même que le port de Zeebrugge ne s’estime pas connecté de manière optimale au réseau routier puisque des travaux d’adaptation (N31 Bruges – Zeebrugge, A11, N49 Anvers – Côte) sont jugés cruciaux à engager. Les camions sont accueillis sur les terminaux de 6 à 22h (standard des ports nord-européens).

A noter que le recours au 45’ permet à tonnage égal de diminuer de 20 % le nombre de conteneurs, donc d’autant le nombre de poids-lourds sur les routes…

Une desserte fluviale problématique

La desserte fluviale du port de Zeebrugge est assez peu performante puisqu’elle ne permet pas le passage de barges de plus de 90 EVP. En effet, s’il est relié à Bruges par un canal d’un gabarit de plus de 2 000 tonnes, il passe au gabarit de moins de 1 350 tonnes au-delà, restreignant ainsi considérablement l’accès aux réseaux des pays voisins. Pour les échanges vers l’est de la Belgique et audelà (Pays-Bas, Allemagne, …), 4 gabarits sont également empruntés, leur capacité étant toutefois supérieure à 1 000 tonnes. Ces contraintes n’empêchent cependant pas le port de Zeebrugge d’être connecté aux plateformes fluviales intérieures : Gand, Terneuzen, Anvers, Willebroek et Meerhout. Notre interlocuteur nous confirme d’ailleurs l’intérêt manifesté pour des « tournées de laitier » permettant de dégrouper, au-delà des écluses, par barge de 90 EVP (Port Connect dispose ainsi d’une barge fluviale, le M / V Were Di) des lots de conteneurs, sachant qu’un armateur comme MSC peut fournir des lots de 40 / 50 conteneurs.

Dans ce contexte, le port plaide pour l’élargissement du canal Schipdonk qui lui permettrait d’être relié de manière satisfaisante aux bassins du Rhin et de l’Escaut et à celui de la Seine.

Pour contourner cette contrainte de gabarit et atteindre de manière plus massifiée et plus rapide les marchés néerlandais, allemands ou plus lointains, deux barges d’estuaire (M/V Deseo & M/V Tripoli) d’une capacité de 400 EVP (350 utilisés) ont été spécifiquement conçues 1 pour passer par la mer et rejoindre chaque jour l’Escaut canalisée. Elles continuent ensuite en direction d’Anvers (60 km) qu’elles atteignent, pour la 1ère darse, en 6 heures puis peuvent poursuivre sur le réseau de transport fluvial européen (Bruxelles, 100 km). Ce service est assuré par Port Connect, la cellule logistique de l’autorité portuaire de Zeebrugge.

Un ferroviaire en développement

La desserte ferroviaire est jugée également perfectible et sont notamment souhaités la création d’une nouvelle gare de triage, le triplement de la voie Zeebrugge – Bruges et l’adjonction d’une 3ème et 4ème voie sur Bruges – Gand, Bocht Ter Doest.

A travers sa filiale Port Connect, l’autorité portuaire propose 12 à 13 trains blocs par jour vers Anvers. Les marchés allemands et est-européens bénéficient d’une desserte quasi quotidienne avec des trains blocs : la liaison avec Duisbourg, qui constitue un hub très important, est en constante progression (6 à 7/ semaine), Manheim est relié tous les jours.

Depuis février 2012, un train opéré par IFB et Naviland Cargo relie 3 fois par semaine Zeebrugge et la plateforme trimodale Delta 3 à Dourges. Il vise à faciliter l’accès aux marchés d’Ile-de-France et ceux d’Europe de l’Est. Cette année a vu aussi le début d’expéditions régulières vers l’Italie du Nord, par un train mutualisé entre 3 entreprises traitant des légumes surgelés.

Nous avons visité la société ECS, opérateur logistique spécialisé dans le transport de marchandises entre le Royaume-Uni, l’Irlande et le continent et travaillant avec des conteneurs de 45’ (33 palettes euro contre 26 iso palettes), fondée en 1995. Cette société organise la logistique de grands groupes (LIDL, Mars, Pepsi, Aldi, Unilever) et sert de base arrière pour ces derniers pour la distribution de lots.

Elle assure ses prestations de transport et logistique à partir de 2 centres opérationnels : Zeebrugge (84 employés en moyenne) et des bureaux satellites à Venlo (Pays-Bas), Le Havre (France), Waterford (Irlande) et Novara (Italie). Elle vient d’ouvrir un bureau à Barcelone, l’Espagne étant avec les pays de l’Est et la Turquie, la prochaine cible de développement.

A la base, ECS s’est principalement consacrée au transport routier, associé à des liaisons maritimes rapides avec le Royaume-Uni. Elle utilise néanmoins de plus en plus le fer.
Elle détient 5 000 conteneurs 45’ (fabriqués en Chine) dont 1 000 reefers autonomes afin qu’ils puissent être transportés par locomotives diesel. En 2011, ont été manutentionnés 155.000 EVP. Elle s’appuie sur une société soeur pour la traction de conteneurs (de courte distance et de haute mer) et de remorques ; société qui compte 200 salariés et offre une capacité de traction de 350 camions sur le continent européen, 200 au Royaume-Uni et une centaine en Irlande.

Elle possède aussi en joint-venture avec Cobelfret, la société C2C Lines dont l’objet est d’assurer un service régulier de conteneurs entre le continent, l’Irlande et l’Irlande du Nord. Chaque semaine, deux services assurent la liaison entre Rouen et Waterford et Warrenpoint, tandis que deux autres relient ces deux mêmes destinations au départ de Zeebrugge. Les navires utilisés à cet effet disposent d’une capacité de 535 à 972 EVP.

Son directeur commercial, Jef Huyben, nous dit apprécier le port de Zeebrugge pour ses nombreux départs journaliers en SS. En Méditerranée, la société utilise aussi le SS avec la Grèce et la Turquie et entre Barcelone et Gènes.

Dans le cadre de son développement européen à venir, ECS entend faire appel autant que possible au transport ferroviaire. Concernant l’adaptation du 45’ au contexte français, notre interlocuteur indique que, contrairement à ce que l’on peut penser, le passage du 45’ sur les voies françaises ne serait pas problématique (souci du gabarit des tunnels ferroviaires) puisque des essais concluants auraient été menés sur la ligne Perpignan – Dourges. En revanche ECS ne trouve pas d’opérateur pour développer leur distribution ferroviaire sur le territoire français, sans doute parce que la réglementation routière française, hors transport pour l’agroalimentaire et en approche des ports, limite le poids à 40 T donc 23,5 T utiles, limite l’utilisation du 45’ (48 T au Pays-Bas, 26 T). Il souligne à cette occasion l’extraordinaire compétitivité du trafic routier en France puisque le trajet Marseille-Belgique ressortirait à 650 / 700 €.


1 - Conçues pour supporter des vagues de 2m (contre 0.8 à 1 m pour les barges classiques), elles coûtent à la production 25 % plus cher mais ce surcoût a été financé par subventions.

Voir également :
- le Port de Gand
- le Port d'Anvers

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