Publications > Les transports en Afrique : enjeux et perspectives (Cabinet Infhotep) > Une Afrique en ébullition qui réalise des sauts technologiques et infrastructurels
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Le transport multimodal se développe avec pour objectif le désenclavement des régions intérieures, la lutte contre la pauvreté et l’amélioration de la compétitivité. L’Afrique continentale accueille de plus en plus de partenaires qui voient en elle l’avenir de la croissance mondiale. C’est ce qu’illustre la Côte d’Ivoire, avec l’aéroport d’Abidjan qui est depuis 2014 le 2ème pays d’Afrique desservi par l’A380 à raison de trois rotations par semaine après Johannesbourg. En août 2015, le président gabonais Ali Bongo Ondimba a annoncé l’arrivée de la compagnie low-cost Flyafrica.com au Gabon après de bons résultats au Mozambique, en Namibie et au Zimbabwe. Le transporteur aérien compte poursuivre son expansion vers l’Afrique de l’ouest et du centre et développer les destinations Libreville et Port-Gentil. Pour les gouvernements l’émergence de l’offre low-cost est l’occasion de populariser des itinéraires sous-développés, entraînant des investissements considérables dans les infrastructures locales de transport et dans le tourisme accompagnés de créations d’emplois.
Sur le plan maritime, les compagnies qui empruntent de plus en plus le couloir sud-africain attendent désormais de nouveaux hubs régionaux, véritables ports de transbordement, alors que Durban est saturé et que leur choix s’est pour le moment porté sur Port Réunion. Enfin, ces ports doivent être correctement reliés à leur hinterland, ce que tentent de faire certains opérateurs comme Bolloré Africa Logistics ou DP World qui vient d’obtenir en janvier 2016 la construction et l’exploitation d’un centre de logistique terrestre à Kigali. A côté de l’expansion des ports historiques, naît un nouveau réseau portuaire qui prend en compte la desserte de la sous-région et s’émancipe de la pression urbaine. C’est le cas des ports de Lekki et Badagry situés à seulement une centaine de kilomètres de Lagos. Kribi, au Cameroun, va concurrencer mais aussi compléter le port de Douala qui subit une profondeur d’eau du chenal trop faible.
On parle enfin de plus en plus de croissance inclusive et de son lien étroit avec le déploiement des TIC qui représente un autre défi. Le Gabon, que d’autres rejoignent, alloue des fonds pour le développement d’un réseau national de fibre optique dans son budget 2016. Dans les régions enclavées leur déploiement permet de favoriser l’inclusion financière et territoriale ainsi qu’un accès aux services essentiels.
Le déploiement des télécoms et des TIC s’accompagne d’une croissance et d’un développement économique significatif. Le cas du Kenya est édifiant. Il détient le taux de pénétration d’internet le plus élevé d’Afrique et a vu le système de paiement par mobile se développer de façon exponentielle, notamment grâce à M-Pesa.
Parallèlement, la crise des matières premières et le ralentissement économique mondial obligent les états du continent à diversifier leur économie et à favoriser les échanges intra régionaux. La diversification repose en grande partie sur l’amélioration des infrastructures pour développer l’industrie et les services. Le PIDA (Programme de Développement des Infrastructures en Afrique) promeut des projets d’ensemble pour le continent, à commencer par la modernisation du corridor multimodal Abidjan – Ouagadougou – Bamako – Niamey et sa poursuite par N’Djamena jusqu’à Djibouti. Le corridor ouest-africain Abidjan – Lagos reliant les différentes capitales côtières d’Afrique de l’ouest n’est pas en reste. Sa modernisation passe par la réhabilitation et la construction de routes, autoroutes, un réseau ferroviaire et le développement des TIC. Plus au sud, la réflexion autour d’un modèle économique plus inclusif pour le Cameroun, la Centrafrique, le Soudan du Sud, l’Ouganda et le Kenya fait son chemin. Cet axe horizontal stratégique se situe entre deux ports majeurs que sont Douala et Mombasa dans un contexte d’accélération des échanges sud-sud. L’enjeu est immense autour du développement de ce corridor. C’est ce que le Kenya a compris en développant d’ores et déjà son réseau vers le Soudan du Sud. Il s’agit d’une partie du projet Lapsset Corridor (Lamu port – South Sudan – Ethiopia Transport Corridor) qui comprend entre autre le déploiement de routes, d’oléoducs et d’une voie ferrée de Lamu à la frontière avec le Soudan du Sud. Le corridor devrait atteindre Douala à l’horizon 2030. Parallèlement, un projet impliquant Djibouti qui rêve de devenir la porte d’entrée d’Afrique de l’est consiste à construire huit corridors la reliant au Kenya, au Sud-Soudan et au Soudan en investissant 900 millions d’USD d’ici 2017. L’ambition serait de réaliser un jour la liaison de la mer Rouge à l’océan Atlantique par le rail (Djibouti-Cameroun).
En raison du potentiel économique de ces projets et des perspectives de croissance durables sur le continent, les gouvernements privatisent et ont davantage recours aux partenariats publics privés (PPP) et aux concessions pour accélérer le développement de leurs infrastructures. C’est ce qu’illustre le projet de centrale hydroélectrique Ruzizi III, premier PPP dans le secteur énergétique dans la région des Grands Lacs, dont le coût global est estimé à 378 millions d’euros. Il comprend les lignes de transport à haute tension approvisionnant le Burundi, le Rwanda et la RDC.
Les pays de la Communauté de Développement d’Afrique Australe (SADC) bien que plus effacés au profit de leur membre et voisin sud-africain omniprésent, développent leur potentiel. Au Mozambique, Maputo dans la catégorie des villes de plus d’un million d’habitants et Matola pour celles entre 500 000 et 1 million d’habitants s’installent à la première place du classement MasterCard 2015 des villes africaines offrant le plus gros potentiel en matière de croissance inclusive en Afrique. Mais le Mozambique subit comme d’autres la baisse des cours des matières premières et surtout du pétrole qui oblige les gouvernements de rente à diminuer les subventions et à chercher de nouveaux relais de croissance grâce à la diversification de leur économie.
Le ralentissement économique mondial et chinois rebat également les cartes. Au premier semestre 2014 les investissements chinois en Afrique ont baissé de plus de 40% et leurs importations de 43%. Ajoutons que les relations sociales sont parfois tendues entre salariés africains et employeurs chinois. Il leur est aussi reproché dans le même temps ne pas assez embaucher de travailleurs africains. Parallèlement, les produits chinois qui inondent le marché africain font bien souvent concurrence aux produits africains.
C’est toute une dynamique d’intégration et d’interconnexion des territoires qui s’accélère aujourd’hui avec notamment le soutien financier de la Chine. Mais la baisse de la demande chinoise en matières premières et la nécessité pour les économies africaines de se diversifier vont amener l’Afrique à se tourner vers d’autres partenaires.
Dans ce contexte, une opportunité s’offre aux entreprises, notamment françaises, de réaffirmer leur connaissance de l’Afrique, de promouvoir la qualité de leur travail et de leur gestion des projets, afin de confirmer la volonté d’accompagnement de l’émergence africaine et du développement de sa population.
Structure de l’étude