Nouvelle réglementation sur les tachygraphes : quel impact sur le transport routier européen ?
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Par Christian Dolderer, Lead Research Analyst, Transporeon (une société Trimble)
31/07/2024
Les règles du “paquet mobilité 1” (Mobility Package I) vont-elles à nouveau impacter le marché du transport ?
Christian Dolderer, Lead Research Analyst, Transporeon (une société Trimble) Christian Dolderer, Lead Research Analyst, Transporeon (une société Trimble) |
Contexte : un nouvel ensemble de réglementations
L’UE avait lancé en août 2020 et en février 2022 la mise en œuvre de ses paquets mobilité 1 et 2 - deux ensembles de règles qui ont annoncé du changement dans le secteur du transport routier. Des impacts significatifs sur la structure du marché du transport étaient attendus, notamment en ce qui concerne les capacités de transport disponibles et l'utilisation du cabotage.
Aujourd'hui, un segment de ces règles pourrait à nouveau avoir un impact. D'ici le 31 décembre 2024, tous les véhicules existants de plus de 3,5 tonnes sans tachygraphe opérant dans le trafic transfrontalier doivent être équipés du nouveau tachygraphe intelligent de seconde génération. À partir d'août 2025, cette mise à niveau s'appliquera également aux camions équipés jusque-là d'un tachygraphe intelligent de première génération.
Effets potentiels sur le marché
Ce qui semble au départ être une visite de routine dans un garage pourrait avoir un impact significatif sur l’ensemble du transport routier européen, à cause tout d’abord du temps nécessaire pour changer l'appareil (estimé à environ 2 heures), mais également du temps total d'immobilisation du camion - temps pendant lequel il n'est pas actif dans son réseau habituel. Sortir le camion de ce réseau ajoute en effet un temps d'immobilisation supplémentaire : il faut donc compter une demi-journée à une journée entière pour le changement d’appareil. La complexité des réseaux, combinée aux capacités limitées des garages, pourrait causer d'autres perturbations si un changement graduel avec un temps d'arrêt minimum n'est pas réalisé.
1 à 1,5 million de véhicules commerciaux ont besoin de cette mise à niveau, et des amendes allant jusqu'à 25 000 euros (le long du corridor Mer du Nord-Méditerranée) sont prévues en cas de non-conformité. Nous faisons donc face à un risque d’engorgement important si trop de camions cherchent à effectuer ce changement à la « dernière minute » (en novembre et décembre). L'augmentation des temps d'arrêt et des perturbations serait une conséquence logique.
Un des plus grands fabricants européens de tachygraphes estimait fin juillet que seuls 25 % environ des véhicules concernés avaient mis leur tachygraphe à niveau. Ce chiffre semble trop faible compte tenu des capacités des garages et des cinq mois restants pour effectuer les mises à niveau. Selon eux, la supply chain dispose cependant d'un stock suffisant de tachygraphes, répondant ainsi aux rumeurs de pénurie.
Il est par conséquent nécessaire d’anticiper la possibilité que tous les camions ne reçoivent pas le nouvel appareil à temps, et s'attendre à une réduction de la capacité disponible, en particulier pour les opérations internationales au cours des premières semaines et des premiers mois de 2025. Il en va de même pour les transports nationaux, qui comportent une part considérable d'opérations de cabotage. Plus les transporteurs d'un pays étranger sont utilisés, plus le risque de pénurie d'approvisionnement sera élevé au cours de cette période. Grâce au module DSRC-RP et à la nouvelle technologie de scannage à distance, les camions dépourvus du tachygraphe requis peuvent être facilement identifiés lors d'un contrôle routier, rendant la non-conformité facilement détectable.
Un autre aspect à prendre en compte est que les camions approchant de la fin de leur durée de vie pourraient être désimmatriculés ou retirés du marché international. Nous ne pouvons pas ignorer la possibilité que toutes ces radiations ou nouvelles affectations ne soient pas compensées par l'arrivée de nouveaux camions sur le marché, surtout si l'on tient compte de la pénurie de chauffeurs et de la situation financière des transporteurs.
Quel pronostic pour fin 2024 et début 2025 ?
La dynamique du marché, en particulier la situation de l'offre et de la demande, s'intensifie. Cette tendance va certainement se poursuivre. Le scénario le plus probable sera celui de rejets plus élevés que d'habitude et d'un plus grand besoin d'utilisation de transporteurs de secours du côté contractuel, ce qui entraînera une augmentation des expéditions spot et des prix plus élevés que d'habitude. Un facteur atténuant sera la saisonnalité au début de l'année 2025, les mois de janvier et février étant généralement caractérisés par une demande en transport plus faible. Cela devrait faire baisser les prix au comptant et réduire le risque de défaillance de l'offre.
Étant donné que les camions équipés de tachygraphes intelligents de la première version devront également changer de dispositif jusqu'à fin août, cette mesure législative du paquet mobilité aura un impact sur la quasi-totalité de l'année 2025. Même si l'impact sera probablement moins important qu'en décembre, janvier et février, un éventuel effet global de désenregistrement pourrait avoir un impact sur l'ensemble de l'année.
Le graphique suivant présente nos prévisions actuelles concernant le développement des capacités jusqu'à la fin de 2024 et le premier trimestre de 2025. Ces estimations ne tiennent pas encore compte de l'impact négatif décrit ci-dessus. Il faut espérer que la majorité des camions recevront leurs nouveaux dispositifs d'ici la fin de l'année afin d'éviter que l'indice de capacité ne subisse d'autres corrections à la baisse.
Indice de capacité des camions en Europe Source : Transporeon Insights [évaluation et prévisions personnelles] |
Une planification précoce (par les transporteurs comme par les chargeurs) du changement de dispositif garantira une transition en douceur et évitera une surchauffe du marché.
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