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Document reproduit avec l’accord de l’ASLOG. L’ASLOG, l’Association française pour la logistique est une organisation neutre et indépendante. Multisectorielle, elle est aujourd’hui la seule association qui couvre l’ensemble des activités au sein de la chaine logistique globale. Elle représente un réseau professionnel de plus de 1500 membres en France et plus de 135 000 en Europe à travers l’ELA (European Logistics Association). Pour soutenir les entreprises dans cette démarche, l’ASLOG, facilitateur d’échanges, se positionne aujourd’hui plus que jamais comme un soutien des entreprises dans leur recherche de compétitivité et de performance globale.
Cosmetic Valley : Le pôle de compétitivité Cosmétique et Parfumerie
En cette journée du 13 mars 2007, la logistique s’offre une cure de jouvence grâce à une série de conférences organisées par l’ASLOG dans les salons feutrés du Cercle Républicain (Paris). La conférence introductive sur le luxe français, les parfums et produits cosmétiques "made in France", décrit un secteur regroupant grandes entreprises, PME, universités et laboratoires de recherches dans la Cosmetic Valley, au sud-ouest de Paris : c’est une association "loi 1901" dont l’axe de développement prioritaire est la mise en réseau des entreprises de ce secteur.
« Cosmétique, science de la beauté et du bien être… ». Ainsi s’exprimait Soline Godet, chef de projets et coordinateur au sein du pôle de compétitivité labellisé le 12 juillet 2005, et baptisé Cosmetic Valley. Nous y découvrons les très grandes marques du parfum et de la cosmétique (Calvin Klein, Castelbajac, Christian Dior, Coty, Davidoff, Guerlain, Hermès, Lancaster, Lolita Lempicka, L’Oréal, Nina Ricci, Paco Rabanne, Shisheido, Sisley, Synarome, Valois), mais aussi trois universités et nombre de laboratoires de recherches. Ce secteur de la parfumerie et de la cosmétique réalise un chiffre d’affaires de 15,2 M€ (en 2006), et connaît une croissance de +5,7 %. Un chiffre d’affaires qui se répartit entre le marché français (43 %, en croissance de +3,5 %) et l’exportation (+57%, en croissance de +7,4 %)… au demeurant, c’est le 4 e secteur exportateur en France, générateur d’un excédent commercial de 6 900 M€. Enfin, la France est le pays qui connaît la plus forte consommation de ses produits, par habitant : 201,30 € par an.
« Un pôle hors normes… », affirme d’emblée Soline Godet : «… Une filière verticale regroupant tous les métiers de l’industrie de la parfumerie-cosmétique ». On y trouve non seulement les grands noms réunis au sein de la Fédération des Industries du Parfum (code NAF 245C, fabrication de parfums et de produits pour la toilette), mais aussi des agriculteurs spécialisés (cultures de plantes aromatiques), des fabricants de principes actifs et autres distillateurs, des packageurs, injecteurs plastiques, fabricants de pompes, conditionneurs, mais aussi des sociétés de mécanique, les laboratoires et centres de formation liés à toutes ces disciplines… et bien entendu les logisticiens qui interviennent tant sous la forme de prestations logistiques (4 Pole, CEPL, Deret…), que dans les projets de recherche (les étiquettes intelligentes) ou dans les projets pilotes (la dématérialisation des documents douaniers).
La Cosmetic Valley est une association fondée en 1994 dans une région, celle de Chartres (Eure-et-Loir), regroupant aujourd’hui 130 membres (et 16 000 employés) : des entreprises (de grands groupes, certes, mais aussi et surtout des PME qui représentent 90 % des membres de l’association) appartenant au monde de la parfumerie et de la cosmétique, mais qui ne se connaissaient pas nécessairement auparavant. « Il fallait donner une image à ce département, berceau historique de la Cosmetic Valley, tout en créant des synergies entre les entreprises exerçant dans un même secteur d’activité », poursuit Soline Godet. Aujourd’hui, ce pôle s’étend sur six départements à l’ouest et au sud de Paris : Eure, Yvelines, Eure-et-Loir, Loiret, Loir-et-Cher, Indre-et-Loire.
« Nos objectifs sont ambitieux ! »
En effet, les objectifs de la Cosmetic Valley sont ambitieux :
- Être le premier pôle mondial dans le domaine de la parfumerie-cosmétique, alors que d’autres pôles émergent aux États-Unis, en Italie, en Corée…
- Avoir des entreprises (notamment des PME) innovantes et leaders sur leur marché grâce à l’appui de la recherche et de la formation,
- S’appuyer sur un réseau dense d’entreprises spécialisées,
- Former un pôle vecteur du développement endogène et exogène.
Cela se traduit concrètement par des actions au service des entreprises, et d’autres actions au service des collectivités.
Au niveau des entreprises, la Cosmetic Valley
participe au développement des territoires
en :
- animant le réseau d’entreprises en favorisant les contacts entre chefs d’entreprises (dîners débats, visites d’usines…), en développant des services (veille, mise en relation…) et en créant un groupement d’employeurs permettant aux employés d’être salariés en CDI de ce groupement tout en évitant les phases d’intérim,
- favorisant l’adaptation des PME aux nouvelles contraintes réglementaires du secteur de la parfumerie-cosmétique (projet de règlement européen REACH concernant la mise sur le marché et l’utilisation des substances et préparations chimiques, bonnes pratiques de fabrication, mise en œuvre des biomatériaux…),
- aidant les entreprises à l’exportation par une présence des PME sur les salons internationaux (Hong Kong, Dubaï, São Paulo, Moscou, Las Vegas…),
- favorisant l’émergence de projets innovants (les cosmétotextiles, par exemple) qui mutualisent les ressources de plusieurs entreprises et de laboratoires de recherches, tout en réalisant l’ingénierie de ces projets de recherche : plus de 15 projets ont ainsi été développés en moins d’un an, représentant un montant de 33,4 M€,
- valorisant l’image de la Cosmetic Valley.
La Cosmetic Valley est aussi au service des collectivités qui la soutiennent financièrement, par l’organisation de plus de 6 congrès ou conventions d’affaires, la promotion de l’image territoriale comme pôle de réputation mondiale, par l’aide à la mise en place de liens entre centres de recherches, universités et entreprises, enfin en favorisant les cohérences entre territoires.
Eco-expériences : Les industriels du secteur Parfumerie et Cosmétique
Cette table ronde animée par Dimitri Coulon, représentant de l’association Orée de protection de l’environnement, présente l’art et la manière de marier l’environnement et l’industrie du parfum et des cosmétiques. Et ce, au travers des retours d’expérience de deux de ses adhérents : LVMH par la voix d’Alexandre Capelli, ingénieur à la direction de l’environnement, et le groupe Alban Muller International représenté par son président, Alban Muller, qui traite de la gestion durable de la biodiversité. Tous deux tentent de répondre aux questions qui viennent aux lèvres des logisticiens : quelles sont les innovations dans ce secteur ? Quels en sont les résultats ? Quelles sont les difficultés rencontrées ? Quels en sont les coûts ? Comment s’organiser ?
Avec une centaine de membres, l’association Orée apporte son aide aux entreprises de tous secteurs industriels (notamment celui du parfum et des cosmétiques) et aux collectivités territoriales. « L’objectif de nos travaux ? Améliorer nos pratiques », répond Dimitri Coulon introduisant ainsi les groupes de travaux thématiques. L’un d’eux, consacré au transport de marchandises, logistique et environnement, s’est achevé en septembre 2006 sur l’édition d’un guide intitulé "Performances environnementales des pratiques de transport et de logistique". Celui-ci propose notamment un état des lieux du transport de marchandises, la présentation des modes de transport et de leurs impacts environnementaux, un panorama juridique et réglementaire, une méthodologie pour mettre en œuvre une stratégie durable, ainsi que des retours d’expériences menées par diverses entreprises et collectivités locales. D’autres groupes de travail portent leurs réflexions sur les parcs d’activités ("de la gestion collective de l’environnement à l’écologie industrielle "), sur les risques environnementaux (avec la création d’un guide pratique, outil d’aide à la mise en place d’une démarche de gestion des risques à destination des PME/PMI), sur la sensibilisation à l’environnement du personnel des entreprises et des collectivités, sur l’écoconception des produits et des services, sur la biodiversité au cœur des stratégies d’entreprises.
LVMH : La conception d’un entrepôt logistique, en intégrant progressivement les critères HQE
« L’environnement est un vrai enjeu d’entreprise », assure Alexandre Capelli (ingénieur à la direction de l’environnement de LVMH), pour qui, « il permet de mieux préparer l’avenir, de répondre à de nouvelles demandes, de faire naître une nouvelle créativité… ». Le point de départ de son engagement a été la Charte Environnement LVMH signée en 2001 par Bernard Arnault dont l’engagement a été renouvelé en 2003 avec l’adhésion au Pacte Mondial des Nations Unies lancé par Kofi Annan. Une Charte qui se décline en 5 points : rechercher un haut niveau de performance environnementale, susciter un engagement collectif, organiser la prévention des risques, se préoccuper du devenir de ses produits, s’engager au-delà de l’entreprise. Cette charte se traduit dans les faits par des actes : la sensibilisation de chacun dans son métier de tous les jours, l’écoconception, la participation aux groupes de travail de l’association Orée…
Connaissez-vous le "Bilan Carbone" ?
Cet outil permet d’évaluer sur un site ou sur une entreprise (peu importe le périmètre d’étude) l’émission de gaz à effet de serre. « Nous avons décidé d’utiliser le Bilan Carbone dans trois de nos maisons : Veuve Clicquot, Hennessy Dior et Louis Vuitton », précise Alexandre Capelli estimant que cette approche s’est avérée très positive. « La démarche nous a permis d’évaluer très rapidement les sites générateurs de gaz à effet de serre, et d’élaborer pour chacun d’eux une politique environnementale. Nous essayons maintenant de la généraliser à toutes les maisons du groupe ». L’analyse fait ressortir les émissions internes des sites propres, les émissions ajoutées (le transport des employés…) et le bilan intégrant l’ensemble des activités de la société (transport des matières premières et des produits finis, approvisionnement des matériaux pour emballages, fin de vie des emballages et des déchets directs, eaux usées, etc.). De cette analyse, il en découle des stratégies visant à diminuer les impacts environnementaux : réduction des emballages, amélioration du chauffage et de la climatisation, recours au transport fluvial et maritime, intervention sur l’éclairage et la climatisation des magasins… « C’est ainsi qu’aujourd’hui, à l’international, le transport des produits passe pour 30 % par l’avion, et pour 70 % par bateau. Par ailleurs, nous sommes parvenus à diminuer de 40 % la consommation d’électricité en adoptant de nouveaux concepts d’éclairage de nos magasins. En éclairant moins, le besoin de climatisation est moindre, ce qui accroît d’autant les gains énergétiques (jusqu’à 60 %) dans les magasins. Pour réduire les déplacements des collaborateurs, il est davantage fait appel aux nouvelles technologies, telles que les vidéoconférences ».
La construction d’un entrepôt HQE
L’ancienne plate-forme logistique centrale de Louis Vuitton (Cergy) servant à la distribution de ses produits vers les six entrepôts régionaux et les 350 magasins du monde entier s’avérait saturée. L’ouverture d’une nouvelle plate-forme de 20 000 m² à Cergy-Saint-Christophe s’imposait. Celle-ci est mise en service au mois de juin 2007. Elle est conçue pour respecter les règles contraignantes de la Haute Qualité Environnementale (HQE). L’une des phases importantes de la démarche HQE est celle de la hiérarchisation des exigences environnementales : pour une construction neuve, il n’est guère envisageable de satisfaire toutes les exigences en même temps. Le maître d’ouvrage doit donc établir une liste de priorités en choisissant parmi 14 "cibles de construction", les trois ou quatre qui lui semblent les plus importantes, celles sur lesquelles un maximum d’effort doit être concentré. Dans cette hiérarchisation des priorités, quatre ou cinq autres cibles sont retenues pour un traitement particulier. Les cibles restantes devront être traitées ultérieurement d’une façon évidemment très correcte, au minimum conformément à la réglementation ou aux bonnes pratiques. Louis Vuitton a décidé de s’impliquer à fond dans sa relation avec l’environnement, l’économie d’énergie, le confort hydrométrique et le confort visuel. Les priorités suivantes sont les matériaux, le traitement de l’eau, celui des déchets, la qualité de l’air et la maintenance. Il a ainsi été prévu que l’entrepôt de Cergy-Saint-Christophe devait être totalement couvert d’une charpente en bois et revêtu de peinture sans COV, et que le chauffage serait en partie (50 % environ) d’origine géothermique. Des panneaux photovoltaïques servent au chauffage du local de surveillance à l’entrée du bâtiment. Des ouvertures dans la toiture apportent une plus grande luminosité. Les fenêtres sont protégées par des brise-soleil pour économiser de l’énergie.
Quant aux eaux de pluies et aux eaux usées, elles sont récupérées et traversent différents étangs pour être dépolluées par les plantes : c’est la "phytorémédiation". Au total, Louis Vuitton a choisi d’atteindre 9 cibles sur les 14 de la démarche HQE, et ce, au niveau très performant. Cet entrepôt de Cergy a servi, avec un autre entrepôt français, à bâtir le futur référentiel des entrepôts HQE.
L’écoconception est aussi à l’ordre du jour
Un autre sujet relativement "nouveau" dans une entreprise telle que LVMH où il convient désormais d’intégrer l’environnement dans la conception des produits de luxe, dans la cosmétique, la mode, la maroquinerie… Pour convaincre les créatifs et les équipes de marketing, plusieurs outils ont été développés, notamment le manuel "Emballage et Environnement", afin de faciliter l’intégration des concepts environnementaux dans la conception des emballages. « Nous avons aussi travaillé sur le Cahier de Tendances Environnement LVMH pour intervenir sur l’écoconception des produits, en définissant une "matériauthèque" qui apporte une information plus complète sur la qualité écologique des matériaux, sur le coût, sur les caractéristiques techniques des matériaux : modes de transformation, résistance… », développe Alexandre Capelli. L’objectif ? Mettre en œuvre des projets qui débouchent dans le choix des matériaux, au travers de l’écoconception et d’une meilleure prise en compte de l’environnement.
Alban Muller International : « La production d’ingrédients cosmétiques va de pair avec la gestion durable de la biodiversité qui nous entoure ».
Fondé voici bientôt 30 ans, le groupe Alban Muller International est spécialiste de la production d’extraits de plantes, notamment d’ingrédients cosmétiques. Moyennant une approche scientifique et raisonnable de la gestion de la biodiversité, il a intégré un certain nombre de concepts relatifs à la gestion durable de la biodiversité[1]. Son usine principale est située au cœur de la Cosmetic Valley, à côté de Chartres. Les employés des deux autres sites sont en relation par vidéoconférence ce qui réduit leurs déplacements, donc la pollution automobile. Alban Muller soutient par ailleurs l’Association de L’Herboretum qui s’engage sur un ambitieux projet de conservation de la biodiversité dans les jardins de L’Herboretum situé à Saint-Ay, près d’Orléans, où plus de 900 espèces végétales sont préservées : plantes ornementales, aromatiques, vivrières, médicinales, industrielles, plantes sauvages, arbres… Toutes les techniques favorisant la biodiversité existent. Les compétences sont présentes en France. Il suffit d’être sensible aux économies pour s’y engager.
« Le développement durable ? Un modèle de développement qui permet d’utiliser les ressources naturelles pour satisfaire nos besoins sans compromettre ceux des générations futures », insiste Alban Muller qui préside aux destinées du groupe qui porte son nom, et par ailleurs président de l’association Cosmetic Valley : « ce mode de gestion concilie trois facettes : le développement économique, le progrès social (et le respect de la personne humaine), la préservation de l’environnement ».
Qu’en est-il de la biodiversité ? « Cette ressource vitale pour l’Homme fournit des biens pour se nourrir (les aliments, en l’occurrence), se loger (du bois), se vêtir (des textiles), se soigner (les phytomédicaments) », répond Alban Muller pour qui, elle fournit aussi des services écologiques, en l’occurrence les productions animales et végétales, la pollinisation des plantes cultivées, le maintien de la qualité de l’air et de l’eau que l’on gère avec les projets de phytorémédiation, de la fertilité du sol, et le recyclage des nutriments. « Bref, c’est l’assurance- vie de l’Homme », assure le conférencier pour qui, c’est aussi un enjeu sociétal du fait des interactions entre l’entreprise et la société civile : « les profits, certes, mais pas à n’importe quel prix, en protégeant la santé des personnes et des générations futures, en réduisant l’impact de l’activité sur le patrimoine commun, en gardant l’équité dans le commerce et la responsabilité dans les échanges… Bref, c’est aussi une certaine forme de gestion humaniste avec la volonté de vivre, mais aussi de laisser vivre aujourd’hui et demain ». Pour les entreprises (et certains grands groupes), cet enjeu sociétal requiert de construire l’acceptabilité dans une démarche réfléchie : « elles se doivent de produire de la confiance, d’intégrer aujourd’hui les enjeux de demain, de prendre en compte les enjeux du développement durable dans la démarche de R & D ». Bref, les entreprises doivent s’engager dans un processus d’amélioration continue. C’est en quelque sorte, un investissement dans la qualité de la gestion.
De l’écoconception…
« Ces réflexions nous ont conduits à l’écoconception des ingrédients… », poursuit Alban Muller, «… en tenant compte des contraintes de la législation en évolution (projet de règlement européen REACH…), des paramètres techniques des industriels (il faut évidemment créer des matières "formulables"), des attentes des consommateurs, et de l’impact sur l’environnement, non seulement des produits, mais aussi de toute la chaîne de production ».
L’écoconception débute naturellement dans les laboratoires de R & D. Une philosophie du naturel baptisée "Natami" a été développée. Elle consiste à fédérer les divergences dans la définition du naturel afin de mettre en place un référentiel, puis à créer des produits conformes à certaines exigences "naturelles" en ayant recours à "l’intelligence verte". Cette philosophie du "Natami" s’applique à tous les ingrédients, bases et actifs, qu’il s’agisse d’émulsionnants naturels, de stabilisants naturels ou d’extraits végétaux… en faisant appel à des écoressources : énergie, eau, matières premières à consommer avec modération, en privilégiant les renouvelables. « C’est ainsi qu’à L’Herboretum, nous faisons usage de pompes à chaleur : nous n’utilisons plus de chaudières au fuel », note Alban Muller pour qui, « il convient de bien se comporter vis-à-vis de la ressource, de s’assurer de la pertinence des procédés (chimie verte) et de l’impact des procédés sur le milieu (bilan carbone) ». Ces principes sont mis en œuvre avec la CCI d’Eure-et-Loir, dans le projet CPPS : Concevoir et Produire Propre et Sobre. Projet tenant compte des économies d’eau, de la recyclabilité des cartons, de la biodégradabilité des encres, de l’utilisation de particules de calage à base d’amidon de maïs, de la sécurisation du stockage des liquides par des cuves de rétention, et de la mise en œuvre de kits anti-fuites pour éviter les atteintes au milieu.
« Notre procédé d’écoconception passe au premier rang par les plantes qui sont renouvelables. Elles utilisent l’énergie solaire non polluante. Elles sont elles-mêmes non-polluantes et sources de phytorémédiation. Sources aussi d’une multitude d’actifs biocompatibles… et sources de belles histoires pour le marketing », stipule Alban Muller qui, pour son approvisionnement en plantes, a favorisé la mise en culture de manière à limiter les prélèvements sauvages et les risques de diminution de la biodiversité, tout en sélectionnant des variétés de plantes à teneur élevée en principes actifs, et en ne récoltant que la partie de la plante concernée. Ses objectifs sont clairs : une production nécessitant moins de solvant, moins d’énergie consommée, mais à qualité constante. C’est ainsi qu’aujourd’hui, les fruits de l’angélique sont récoltés à la moissonneuse-batteuse.
… à l’écoproduction
Par ailleurs, les cultures se trouvent à proximité du lieu de production, ce qui offre des avantages multiples : réduction de la monoculture beauceronne et son remplacement par des champs renfermant 75 espèces de plantes médicinales, diminution des nuisances dues aux transports, amélioration du contrôle de la production de la traçabilité, contribution à une politique de filière, tout en renforçant la Cosmetic Valley.
Alban Muller : « pour préserver l’environnement, nous essayons d’utiliser des solvants issus de sources naturelles et renouvelables… En l’occurrence l’éthanol obtenu par distillation de la betterave et du blé, la glycérine qui est un sous-produit de la transestérification d’huiles de tournesol, de palme, de colza, et plus généralement des huiles végétales (culture de jojoba) de préférence aux huiles minérales ».
L’usine proprement dite a été certifiée ISO 14001 en 2004. Il n’est point de petits bénéfices ! Il s’agit d’abord de mieux gérer la consommation d’eau en maîtrisant simplement la quantité d’eau de lavage par une mesure au compteur (gain de 27 % en trois ans), en réutilisant l’eau de procédé dans le circuit de refroidissement, en recyclant enfin l’eau de lavage par les "Jardins Filtrants". La gestion des déchets a, elle aussi, été améliorée en respect de la méthode dite des 3R : Réduire les sources de déchets, Réutiliser (les palettes, les emballages navettes…), Recycler (compostage des déchets végétaux issus de la production).
Quid des "Jardins Filtrants" servant à réaliser le traitement des eaux usées dans différents bassins ? « C’est un système naturel d’épuration des eaux de lavage par phytorémédiation, qui est le terme savant désignant la dépollution par les plantes ». Ce procédé baptisé Phytorestore fournit de l’eau de qualité telle que les rejets peuvent être déversés dans le milieu naturel. Ce recyclage de l’eau sur place est source d’économie. L’eau- ressource n’est pas réutilisée en fabrication, mais dans des applications telles que l’arrosage.
Désormais, sur un peu plus d’un hectare, le "Jardin Filtrant" de la Cosmetic Valley comporte :
- Des filtres végétaux verticaux dont les racines vont fixer certains polluants. L’eau chargée de polluants circule dans ces filtres du haut vers le bas en traversant successivement la rhizosphère[2] et différents autres substrats.
- Des filtres végétaux horizontaux constitués de deux couches de matériaux drainants de granulométrie différente. L’eau qui circule dans un tel filtre rencontre une grande quantité de racines d’espèces différentes (roseaux, joncs, iris, rubanier).
- Le traitement d’épuration est finalisé
dans des bassins plantés constitués
de groupements de végétaux (iris,
nymphéas, myosotis des marais, renoncules)
garantissant une bonne épuration.
- La bambouseraie et la saulaie apportent une désinfection supplémentaire des eaux, ainsi qu’un abattement de la teneur en phosphore.
- Le traitement s’achève dans les "chenaux des cinq sens". Ces chenaux sont ornés de plantes en rapport avec les sens : le chenal de l’odorat (oranger du Mexique, lavande, romarin, thym, armoise, coronille, chèvrefeuille), le chenal du goût (rhubarbe, arbousier, groseillier noir ou rouge), le chenal de la vue (iris des marais, salicaire, buddleia, hémérocalle), le chenal de l’ouïe (bambou, saule pleureur, saule à feuilles de romarin), le chenal du toucher (pin, graminées, ail géant, gunnéra, taxodium, herbe de la Pampa).
« Nous avons également introduit un système de séchage des extraits végétaux à basse température (45 °C) par zéodratation mettant en œuvre une zéolithe, donnant des extraits natifs susceptibles d’être mis dans différents adjuvants, et ce, sans rejets toxiques » ajoute Alban Muller. La zéolithe est une argile poreuse qui absorbe l’eau et donne une réaction exothermique : la chaleur peut être récupérée. Autre méthode : la pasteurisation flash, technique de décontamination économe en énergie. Elle évite le recours aux conservateurs et respecte l’intégrité des molécules actives.
Finalement de nouvelles pistes s’ouvrent pour la sauvegarde d’espèces menacées ou en voie de disparition (une orchidée de Madagascar) : pour la sauver, il suffit de la valoriser !
Comment
la Supply Chain soutient les évolutions
du marché
des dermocosmétiques
Animée par Jean-François Fusco (Aexxdis), cette table ronde réunit Christophe Ettviller (Pierre Fabre), Yann Hay (Laboratoires Expanscience), François Grosso (Pharma DEP) et François Peignes (PEA Consulting).
En guise d’introduction, Jean-François Fusco, pharmacien responsable, directeur général d’Aexxdis, précise que sa société est un dépositaire pharmaceutique européen qui peut se targuer de 15 années d’expériences dans le domaine de la santé. Elle est née en 2004 de la cession des activités de distribution des laboratoires Baxter Healthcare en France et possède 7 filiales hors de France. Elle réalise un chiffre d’affaires d’environ 100 M€, dispose de 120 000 m² de plateaux techniques, et bénéficie du savoir-faire d’experts notamment dans le domaine de la distribution internationale des produits dermocosmétiques, et des différentes typologies qui prévalent dans les différents pays où elle intervient. « Par exemple, l’Angleterre se démarque par les promotions et le copacking : "trois au prix de deux" pour des produits sous les projecteurs de la publicité. En Espagne, ce marché des produits dermocosmétiques est très éclaté. Dans les pays d’Europe centrale et de l’Est, la vente d’un produit dermocosmétique est souvent appuyée par un médecin : en Pologne, comme en Tchéquie, il est prescrit après une visite médicale ». Il n’y a donc pas de solution unique, ni de stratégie unique de distribution européenne de la dermocosmétique. « Plutôt des stratégies différenciantes pour coller aux marchés, et une diversité de solutions », conclut le conférencier. Il est vrai que la dermocosmétique relève d’une alchimie dans laquelle le principe actif apporte un effet (attendu) qui va bien au-delà du glamour. Un produit de grand volume de ventes qui relève du mass-market, qui ne doit pas s’altérer et ce, grâce à l’addition de suffisamment de conservateurs et d’adjuvants. Un produit sur lequel pèse plus de vigilance… Voilà pourquoi le législateur s’en préoccupe avec la dermovigilance.
La gestion de la demande de produits dermocosmétiques
Un champ d’investigation important s’ouvre au consultant, avec, en son centre, la maîtrise de la demande. Les outils de management de la logistique et de la Supply Chain sont à même de satisfaire les exigences des clients.
François Peignes, associé chez PEA Consulting, admet que le marché de la dermocosmétique est international, et sujet à une demande qui fluctue d’un pays à l’autre, et qui fluctuera certainement de plus en plus au cours des années à venir. Ce n’est donc pas un marché qui a pour vocation de se standardiser. D’autre part, le nombre de produits concernés par la dermocosmétique va croissant, avec un nombre de présentations lui aussi croissant, et des cycles de vie de plus en plus courts. En outre, ce marché se caractérise par de multiples canaux de distribution et de multiples typologies de clientèles qui se répartissent entre les officines pharmaceutiques, les grossistes, la grande distribution, les coopératives d’achat… avec de surcroît des exigences variables d’un canal à l’autre. Enfin, ce marché est marqué par des effets promotionnels et des effets saisonniers qui ne sont pas nécessairement très simples à gérer.
« Cet état des lieux implique un rapprochement indispensable des activités commerciales et des activités logistiques, qui va au-delà du rapprochement toujours nécessaire dans le domaine industriel », estime François Peignes.
Le rapprochement commercial-logistique
« La gestion de la demande est l’articulation fondamentale dans les relations entre les forces commerciales et les forces logistiques », affirme François Peignes. Elle passe par les prévisions, en tenant compte de la logistique promotionnelle, des effets saisonniers, les effets de bords dus au lancement de nouveaux produits, aux substitutions de produits, à la fin de vie des produits… « Il est important d’anticiper la demande pour réaliser une bonne gestion de la consommation des prévisions par la demande ».
Une autre réflexion porte sur la composition des commandes, et sur la logique promotionnelle et commerciale sous-jacente : la constitution de paniers de ventes, l’association de produits lors de campagnes promotionnelles… ont des impacts logistiques, tant sur la prévision, que sur les activités logistiques au niveau de l’exécution (notamment les activités de préparation de commandes et de colisages).
En amont, se profilent des questions organisationnelles, et en aval, des problématiques d’exécution. Côté organisationnel, il y a d’abord lieu de bien définir les rôles de chacun (le "mapping" des acteurs participant à chacun des processus), tant au service commercial qu’à la logistique, tout au long de l’exécution des flux. Il convient d’abord de réconcilier les actions des différents acteurs commerciaux de la chaîne de valeur, pour donner une vue harmonisée aux forces logistiques. Ensuite, le pilotage des flux doit assurer l’engagement de taux de service, et mettre en œuvre les moyens d’exécution requis pour que la logistique puisse assurer ce taux de service, en tenant compte des chartes des clients : celles-ci varient toutefois selon les différents canaux de distribution et selon le poids de chaque client dans son canal. Une réflexion de fond est indispensable de manière à relayer les contraintes logistiques imposées par ces chartes dans les moyens d’entreposage et de transport.
« Une autre réflexion organisationnelle porte sur l’art et la manière de gérer les litiges, ou pour le moins, les écarts : quels sont les acteurs (forces commerciales ? Prestataires logistiques ?) impliqués dans l’arbitrage de ces litiges ? Comment s’échangent-ils des informations ? », s’interroge François Peignes, pour qui « une bonne organisation, avec une bonne gestion de la demande, peuvent présager une bonne exécution des opérations ».
Le relais est pris par l’opérationnel, les outils qui vont piloter les flux et exécuter les opérations, les entrepôts et les organisations de transport. Il convient en effet d’optimiser les flux logistiques, assurer l’optimisation des zones de stockage eu égard au taux de rotation des produits… pour atteindre in fine la performance dans l’exécution des opérations logistiques.
Considération également importante : la capacité de prendre en charge les actes de différenciation retardée au sein des entrepôts, c’est-à-dire des actes de conditionnement associés aux ordres de préparation, qui doivent permettre de retarder la personnalisation des produits eu égard aux besoins du marché. Cette capacité est essentielle dans les plates-formes à vocation européenne, là où il faut prendre en compte les demandes de conditionnement dans des langues différentes, avec des packagings différents selon les pays.
Pour François Peignes, il convient enfin de s’engager dans la voie des indicateurs d’activités logistiques en adéquation avec les taux de service figurant dans les chartes de service aux clients, ce qui présuppose une organisation dans les entrepôts, spécifique à chaque canal de distribution, ou pour le moins, la capacité à mesurer la performance des opérations dans chacun des canaux, voire même pour chacun des clients.
La logistique est un outil au service de la vente
Il y a en France quelque 22 500 officines pharmaceutiques. La pharmacie représente 8 % du chiffre d’affaires du commerce de détail en France, et 7 % des marges. C’est un circuit qui pèse très lourd, et l’on estime que la marge globale du circuit pharmaceutique n’est pas très éloignée de celle des hypermarchés. Néanmoins, ces données résultent du mélange d’activités très différentes, depuis la délivrance de produits prescrits, jusqu’à la distribution dans des points de ventes au service d’une stratégie marketing dont les bénéfices sont partagés avec les laboratoires.
« Dans le mot "distribution", il y a une association de compétences commerciales et de compétences logistiques », explique d’emblée François Grosso qui a été président de Pharma DEP. « Au-delà de ce trait d’union, on a longtemps considéré, et je considère encore personnellement, que la logistique est un outil au service de la vente ». En pharmacie, cette assertion paraît particulièrement flagrante. D’autant plus que le marché a considérablement évolué, notamment par son organisation pour servir les points de distribution et les points de vente. Un marché qui a subi des modifications majeures. Elles impliquent des démarches commerciales et par voie de conséquence des démarches de distribution qui se sont différenciées.
Jusque dans les années quatre-vingt, le secteur des dermocosmétiques disposait d’un seul circuit de distribution transitant par la pharmacie dont les atouts sont évidents : la proximité du consommateur final (une pharmacie est à 350 m de chaque concitoyen), des ventes prescrites essentiellement sur ordonnances… « Et rien ne ressemblait plus à une pharmacie, qu’une autre officine », lance François Grosso. Depuis, les dermocosmétiques ont eu accès aux grandes surfaces, puis aux parapharmacies spécialisées. Dès lors, on trouve aujourd’hui au moins deux types d’acteurs intervenant sur le marché des produits dermocosmétiques purement "pharmaceutiques" : les pharmacies elles-mêmes, et des structures "modernes", avec, dans chacune de ces catégories, des points de vente de natures différentes. On dénombre en particulier un nombre réduit d’officines (moins de 500) qui pèsent considérablement sur les ventes des laboratoires et industriels pharmaceutiques, ainsi que quelque 2 500 à 3 000 points de vente intervenant sur le marché dynamique de la parapharmacie et des compléments alimentaires, avec des produits qui n’ont rien de commun avec ceux de la prescription médicale. « Dès lors, le niveau d’exigences de ces points de distribution est forcément élevé », affirme François Grosso qui souhaite porter l’attention de son auditoire sur deux exigences particulières de ces acteurs, venant s’ajouter à des demandes multiples, et constituant des pistes de réflexions pour l’avenir :
- La fiabilité du service logistique de base : « le pharmacien est mal habitué, car il fait appel, pour 80 % de ses achats, au répartiteur pharmaceutique pour être livré trois, voire quatre fois par jour ». En outre, il peut lui rendre ce dont il n’a plus besoin. « On est par conséquent dans un secteur relativement gâté, au sens positif du terme bien entendu », estime l’orateur pour qui, « la qualité du service de base de la vente directe en pharmacie, quel que soit le type de produits, constitue un frein au développement des stratégies commerciales et marketing des laboratoires ». Il constate par ailleurs que la disponibilité des produits dermocosmétiques, la qualité de ces produits (emballages déchirés, gestion des dates de péremption relativement aléatoire), la fiabilité des préparations, et la qualité des transports, sont fragiles, et pas forcément satisfaisantes. Tant et si bien que certaines grandes pharmacies ont été amenées à créer de véritables entrepôts logistiques approvisionnés par les laboratoires et leurs prestataires logistiques, et qui en aval se chargent de la distribution aux officines.
- La prise en charge par des tiers d’un certain nombre d’opérations sur le point de vente. Lorsqu’un acteur réalise un chiffre d’affaires de quelques dizaines de millions d’euros, dont 50 à 60 % en parapharmacie, il peut être très demandeur de prestations visant à la formation de ses équipes, l’installation de PLV, l’habillage des linéaires, la mise en place des produits sur les rayons, l’animation des ventes… « Bref, on observe l’expression d’un besoin d’externalisation "à l’envers", où le point de vente demande à l’opérateur industriel ou à son prestataire logistique d’intervenir pour dynamiser ses propres ventes », souligne François Grosso pour qui, « il y a là un véritable jeu gagnant-gagnant à condition que le prestataire logistique ou le laboratoire soit capable d’apporter de la valeur ajoutée à ladite prestation, mais aussi et surtout de la financer ».
L’Europe de la distribution est en marche
L’Europe est en marche vers de nouvelles façons de distribuer les produits dermocosmétiques. Voilà une tendance lourde. Mais, il faut au préalable harmoniser les modes de distribution, alors qu’aujourd’hui les pratiques sont extrêmement différentes d’un pays à l’autre.
« La dermocosmétique regroupe des produits qui se situent à la frontière du réglementaire, entre médicaments et dispositifs médicaux… », note Christophe Ettviller, Directeur Logistique Client, chez Pierre Fabre : « ils tissent leur toile sur une réglementation complexe, appelée à devenir de moins en moins souple ». Ce sont des produits cosmétiques, certes, mais intervenant dans le marché de la grande consommation avec ce qui s’y rapporte (des effets saisonniers, de la publicité…) alors qu’ils s’intègrent dans le circuit de distribution le plus réglementé en France : le circuit pharmaceutique, celui des médicaments, avec toutes ses contraintes, ses obligations de traçabilité… et pourquoi pas, demain, des circuits de retour de produits dermocosmétiques (comme pour les médicaments). « Il y a donc là un paradoxe, un produit libre dans un monde réglementé. Un produit libre ? Va-t- il le rester s’il devait pencher du côté du médicament ? », s’interroge Christophe Ettviller.
Le marché des dermocosmétiques est en évolution. Alors qu’historiquement, le circuit de distribution privilégié passait par les pharmacies, aujourd’hui, l’ensemble des pays européens s’ouvrent vers d’autres modes de distribution : les GMS, les canaux spécialisés. Aux Pays-Bas, on les trouve dans les drugstores, comme dans les stations services. « De surcroît, la structure du marché pharmaceutique évolue : la réglementation sur la structure capitalistique des pharmacies pourrait autoriser le regroupement en chaînes de pharmacies, comme cela se pratique déjà en Norvège ou en Grande-Bretagne », estime Christophe Ettviller. Cette structuration autorisée dans ces pays modifie totalement la donne. C’est une tendance lourde à laquelle nous serons confrontés. « Il est certain que la France sera l’un des pays qui acceptera ce genre de structures ». Mais quand ? Il n’y a pas d’harmonisation européenne, pas de calendrier… « En revanche, le jour où la démarche se concrétisera, cela changera radicalement la façon de négocier, de traiter, de distribuer les produits ».
Le problème se posera demain, alors qu’aujourd’hui, nous nous trouvons en position d’attente, sans trop pouvoir anticiper, ni peser sur l’évolution de cette distribution : dans ce contexte, comment atteindre les clients très rapidement, tout en les différenciant, et en mettant en œuvre une Supply Chain susceptible de répondre à leurs attentes ? Et comment offrir un service clients dans un contexte où les attentes sont différentes et les moyens variables ? Comment la réflexion logistique peut-elle enrichir l’approche marketing ?
Quelles réponses apporter ?
Les réponses sont multiples : une relation de proximité avec les clients afin de satisfaire leurs attentes (on ne va pas traiter de la même manière les 80 premières pharmacies françaises et la pharmacie au fin fond de la Corrèze), une démarche CRM, la traçabilité (préoccupation majeure des pouvoirs publics) et le suivi des transporteurs, une démarche qualité elle aussi différenciante, des expériences partagées, une meilleure gestion de la demande… et pourquoi pas, un modèle de production à la demande (make-to-order) ou de conditionnement à la demande (packaging-to-order) dans une logique de différenciation retardée ?
La maîtrise des prévisions de ventes d’Expanscience
Les gammes s’étendent, les cycles de vie se raccourcissent, les procédés de fabrication sont de plus en plus complexes, la distribution se diversifie… Dans ces conditions, répondre à la demande moyennant un taux de service élevé constitue un véritable enjeu qui requiert une approche originale visant à la maîtrise de la Supply Chain. Tel est le propos de Yann Hay, responsable de la gestion de la demande aux Laboratoires Expanscience.
Depuis 1950, Laboratoires Expanscience est une société familiale indépendante qui intervient dans le monde de la pharmacie et de la cosmétique. Une société qui réalise en 2006 un chiffre d’affaires de 200 M€ (un tiers à l’étranger), avec 800 personnes, et qui connaît une croissance de 8 à 10 % par an. Les nouveaux produits représentent environ 10 % de son activité. « Nous sommes présents dans plus de 50 pays au travers de 7 filiales et des agents de distribution », ajoute Yann Hay. Son produit phare, Mustela est une marque leader européen de soins pour les bébés : il réalise 55 % de ses ventes hors de France. D’autre part, les Laboratoires Expanscience possèdent un leadership dans le traitement d’appoint des douleurs arthrosiques et des parodontopathies. « En somme, précise Yann Hay, nous sommes présents sur le marché de la médecine générale et de la rhumatologie qui représentent 43,2 % de notre chiffre d’affaires, mais aussi sur le domaine de la dermocosmétique (40,2 %), la dermatologie (10,1 %), les soins dentaires (3,6 %), les actifs cosmétiques (0,6 %), les compléments alimentaires (produits pour la minceur) ».
Le processus de prévision des ventes est essentiel et fondamental au suivi d’activités de l’entreprise.
Les Laboratoires Expanscience disposent d’un site unique de production, à Épernon, entre Rambouillet et Chartres. Cet établissement élabore une grande diversité de produits dans un univers réglementé contraignant, et rapidement évolutif. Pour maîtriser ses approvisionnements, ses stocks et sa production, satisfaire au mieux ses clients (générateurs de chiffre d’affaires !) et se différencier par rapport à la concurrence, rien de tel qu’un processus éprouvé de prévisions de ventes, vecteur de rentabilité de l’entreprise.
« Les prévisions concernent tous nos produits et tous nos canaux de distribution ». Yann Hay indique que « la PLV est la seule catégorie de produits qui n’est pas gérée dans ce processus ». Il est vrai que bien souvent, la gestion de la PLV est entre les mains du marketing qui approvisionne selon ses besoins, de façon totalement découplée du processus de production et de mise à disposition : on pourrait certes imaginer qu’elle réintègre le processus normal des entreprises. Il faudrait qu’alors le marketing produise un cahier des charges des PLV dont la conception et la fabrication suivraient alors le processus d’élaboration des autres produits…
Chez Expanscience, à partir du 3 de chaque mois, les canaux de distribution (France, filiale, export) alimentent le processus de prévisions de ventes sur un horizon glissant de 12 à 18 mois. Sur cette période, les trois prochains mois sont bloqués : toute modification intervenant sur ce trimestre est soumise à validation, soit du service de gestion de la demande, soit de la production. Yann Hay s’explique : « s’il s’agit d’une demande de quantité supplémentaire sur ce qui a été prévu le mois précédent, la validation doit être donnée par la production afin de s’assurer que les composants sont disponibles et qu’un autre produit ne risque pas d’être lésé par cette demande supplémentaire qui, si elle est refusée, sera reportée sur le premier mois de la période non figée. Par contre, toute demande de modification à la baisse est intégrée immédiatement ».
Puis, entre le 20 et le 25 de chaque mois, est organisée une réunion de validation collaborative des prévisions de ventes en France et à l’export. Cette réunion est organisée par le service de gestion de la demande (responsable de la Supply Chain), sous la responsabilité du marketing, avec le support du contrôle de gestion (suivi budgétaire) et du service commercial.
Le 30 ou le 31 du mois, les prévisions (y compris celles des filiales) sont consolidées de façon à pouvoir les intégrer dans l’ERP (le progiciel Movex de Lawson) dès le 1 er de chaque mois suivant.
Comment améliorer le service au client tout en maîtrisant les coûts ? Par l’élaboration de meilleures prévisions collaboratives entre le marketing, le commercial, la production et la Supply Chain, en identifiant plus vite la faisabilité d’une opportunité commerciale, en comprenant mieux les impacts des décisions sur les programmes de production, les stocks et les risques de rupture, enfin en gérant plus finement le niveau de stock dans les filiales. Comment y parvenir sans disposer d’un outil informatique plus puissant, permettant d’entamer une démarche globale d’amélioration de la Supply Chain ?
Autrefois, le calcul statistique des prévisions était réalisé simplement au moyen du tableur MS/Excel en se basant sur trois années d’historique, en y intégrant notamment les opérations promotionnelles. L’outil mis en œuvre depuis avril 2006 dans ce processus de gestion de la demande est la suite complète (depuis la prévision de ventes jusqu’aux calculs d’approvisionnements) de l’éditeur TXT e-Solutions. Deux personnes sont attachées à plein-temps au processus de gestion de la demande, en assurent le support, pour garantir la qualité de l’outil à une vingtaine de prévisionnistes appelée à l’exploiter. Le logiciel effectue un calcul statistique de tendances des ventes des 450 références actives, en se référant toujours aux trois années d’historiques, en y intégrant les opérations promotionnelles, les nombres de jour de rupture, en se donnant la possibilité de distinguer les ventes directes des ventes des grossistes.
Par ailleurs, les filiales peuvent désormais être intégrées dans un processus de gestion partagée des approvisionnements : « à partir du moment où leurs niveaux de stocks sont connus, ainsi que leurs prévisions de ventes, il nous sera possible de "pousser" nous-mêmes l’approvisionnement de leurs stocks, sans avoir à passer par le processus classique de la commande », explicite Yann Hay.
De la même façon, un processus de cross-dock peut être imaginé entre filiales dès lors que la totalité des stocks est connue en centrale : « si l’une de nos filiales dispose de trop de stock d’un produit, alors qu’une rupture s’amorce dans une autre filiale, nous pourrons décider d’effectuer un "transfert" de marchandises d’une filiale vers l’autre ».
Désormais, la fiabilité des prévisions de ventes est suivie par la Direction Supply Chain qui se fonde sur le référentiel de l’ASLOG, sous la responsabilité du service marketing, et présentée en comité de direction. « Il est clair que pour les produits pharmaceutiques, cette fiabilité est plutôt bonne (la promotion des médicaments est interdite) », souligne Yann Hay, reconnaissant qu’entre 2005 et 2006, « le taux de service (calculé sur l’exécution complète des commandes) est passé de 83 à 90 %. Cette croissance aurait même pu être plus forte et atteindre 94 % si nous n’avions pas rencontré des problèmes techniques sans rapport avec le processus de gestion de la demande ». De même, la couverture moyenne de stock, calculée pour l’ensemble des produits (matières premières, articles de conditionnement, produits finis), représente 95 jours de ventes, alors que cette couverture était de 112 jours, voici un an. Enfin, le retour sur investissement est estimé au moment de la conférence (alors que seuls 3 des 6 modules du progiciel étaient implantés) à 14 mois.
En aparté : les bonnes pratiques de la logistique de distribution chez Expanscience
Du service au client, jusqu’à la livraison des produits chez les clients… Christian Sarafian, responsable Support Clients et Logistique de distribution, témoigne.
« Apparemment, la logistique de distribution d’Expanscience est simple ». Christian Sarafian acquiesce en présentant une structure, apparemment linéaire, avec un site de production à Épernon, un site unique de stockage et de préparation des commandes, et des clients en France et à l’international. « Mais en regardant de plus près, force est de constater que cette structure est complexe ». Complexité due à la diversité des typologies des produits pharmaceutiques (soumis aux contraintes réglementaires), des produits cosmétiques et nutraceutiques (soumis à des contraintes de coût), des produits promotionnels. Complexité également résultant de l’hétérogénéité des réseaux de distribution : vente directe, livraison aux grossistes et aux entrepôts, livraisons aux particuliers, exports… et ce, dans un contexte de croissance forte.
« Nous devions définir une organisation logistique la plus "tout terrain" possible, c’est-à-dire capable de satisfaire l’ensemble des contraintes… », soutient Christian Sarafian, «… et d’identifier les leviers d’action qui permettent d’agir de manière optimale sur la satisfaction client ». A CET EFFET, IL SE DOIT DE GERER LA RELATION CLIENT DE MANIERE DIFFERENCIANTE, MESURER ET SUIVRE LE TAUX DE SERVICE CLIENTS. LES INDICATEURS CLES RETENUS PAR EXPANSCIENCE SONT LES SUIVANTS :
- Taux
de service clients :
- On Time : taux de respect des délais,
- In Full : taux de commandes complètes,
- No Error : taux de commandes sans litiges.
- Relation
client :
- Taux de décroché des appels (des pharmaciens…),
- Délai de résolution des litiges,
- Bilan d’image.
Dans ce contexte, la traçabilité est essentielle. « Bien entendu, la traçabilité réglementaire sur les produits (lots et expéditions)… », dit Christian Sarafian, «… mais aussi celles des flux logistiques et d’information indispensables pour la détermination des indicateurs de performances ». Ce qui suppose de disposer d’outils pour effectuer les mesures, enregistrer les opérations au niveau le plus fin et synthétiser les résultats. Pour relever tous les défis, Christian Sarafian estime qu’il lui faut :
- maîtriser les coûts et éviter la surqualité dans les environnements de produits et clients hétérogènes,
- assurer efficacement la
traçabilité et la mesure des opérations avec des
systèmes hétérogènes, au travers :
- d’une réflexion sur l’interfaçage entre applicatifs (une dizaine),
- de l’utilisation des standards GS1 (codification et messages EDI).
- adopter une approche logistique internationale,
afin :
- d’apporter de la valeur (formation aux bonnes pratiques, GPA) aux filiales commerciales,
- d’entreprendre une réflexion sur les schémas physiques de distribution,
- de mesurer la performance.
[1]
La biodiversité ou diversité biologique
est définie comme "toute variété
de vie sur terre". Elle désigne la
diversité des écosystèmes
qui en constituent les paysages, la diversité
des espèces animales et végétales,
et la diversité génétique
des individus.
[2] La rhizosphère est la zone où
se développent les racines d’une
plante
Solutions
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