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INTERVIEW
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‘‘ Partager l’utilisation des moyens supply chain’’ I. BADOC, GENERIX
Interview d’Isabelle BADOC, Supply Chain Solutions Marketing Manager chez Generix Group.
Réalisée le 19/10/2018 par Frédéric LEGRAS, Directeur du Portail FAQ Logistique dans le cadre du dossier thématique « Supply chain collaborative : enjeux et solutions ».
Pourquoi introduire de la collaboration dans sa supply chain ?
L’objectif est double. Il s’agit :
Ludovic DIDELOT | SIGMA Evelyne RAYNAUD | A-SIS Audrey CAYETANO | S2PWEB ALPEGA Jérôme BOUR | DDS LOGISTICS Jenny ROMAN | AMBER ROAD TRANSPOREON |
- D’améliorer la satisfaction client
- Et de réduire les coûts de la supply chain globale
Néanmoins, notre expérience dans la mise en place de projets de collaboration révèle que ces deux objectifs sont finalement très imbriqués et ont donc tendance à aller de pair.
Il en est d’ailleurs de même pour l’impact environnemental. Je pense en particulier aux projets de mutualisation qui permettent à la fois :
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De répondre à la demande des clients de livraisons plus fréquentes,
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D'optimiser les coûts par une réduction du vide,
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Et de limiter les externalités négatives grâce à la diminution globale des kilomètres parcourus.
- L’amélioration de la satisfaction client
L'objectif est de formuler la bonne promesse et de la tenir pour fidéliser le client et ainsi développer son chiffre d’affaires.
Avec la supply chain collaborative, chaque maillon dispose de nouveaux moyens pour mieux travailler. Les acteurs bénéficient en particulier de la vision de ce qui se passe dans leur propre entreprise, mais également en amont de la chaîne chez leurs fournisseurs et transporteurs.
L’objectif est d’éviter d’avoir à subir d'éventuels aléas. Si néanmoins un problème intervient, il devient possible de l’anticiper en termes d'exécution. Le but est de ne pas désorganiser son propre maillon pour ne pas dégrader la prestation offerte au client.
Cette même visibilité peut également être mise à disposition des acheteurs finaux pour les rassurer sur la bonne réalisation de leur livraison ou pour les prévenir d’un éventuel retard.
La collaboration peut aussi se traduire par un meilleur partage des prévisions et donc par une planification plus performante. Là, il s’agit plutôt de récupérer de l’information en aval et de la remonter en amont de la chaîne. Prenons l’exemple d’un distributeur qui communique des prévisions sur ses ventes ou sur l’efficacité d’opérations commerciales à ses fournisseurs industriels. Ceux-ci vont pouvoir mieux dimensionner leurs moyens pour anticiper un pic de consommation. Les ruptures en linéaires seront donc logiquement réduites.
Ensuite, je l’évoquais en introduction quand je parlais de mutualisation, partager les moyens de la supply chain permet d’atteindre des seuils de volumes et ainsi de mieux répondre aux exigences des clients notamment en termes de fréquence de livraison. Les délais de mise à disposition peuvent être accélérés.
Enfin, faire en sorte que tous les participants, des clients aux fournisseurs en passant par les transporteurs ne partagent « qu'une seule version de la vérité » permet de totalement revoir la façon de traiter les litiges. Autrement, récupérer l'information se révèle généralement tellement complexe que la gestion du litige se limite finalement à négocier la valeur des pénalités.
Au contraire, la collaboration permet de mettre en évidence ce qui s'est réellement passé et de lutter contre les causes de ces dysfonctionnements et donc in fine de toujours mieux satisfaire les clients.
- La réduction des coûts dans la supply chain globale
La collaboration permet de réduire ses stocks. En associant ses volumes avec ceux de ses partenaires, il devient donc possible de livrer plus souvent les clients en petites quantités à un coût raisonnable.
C’est pourquoi nombre d'initiatives de mutualisation ont été lancées ces derniers mois. Celles-ci peuvent aussi bien concerner la logistique que le transport.
Aujourd’hui, ce sont néanmoins essentiellement les plateformes de mise en relation qui permettent d’initier une telle démarche sans nécessiter plus d'effort que celui de s'abonner à un service.
Mais d’autres modèles plus collaboratifs existent. Des industriels ont ainsi réussi à s’accorder pour partager des moyens sans forcément recours à un tiers facilitateur. Certains ont même essayé d’aller au-delà du partage du personnel d’entrepôt intérimaire pour étendre la collaboration à la mise en commun de ressources humaines sur des compétences supports de type customer service ou prévisionnistes. La démarche a du sens. Il est évident qu'en fonction des marchés et des saisonnalités, des reports de charges peuvent s’avérer pertinents.
La collaboration entre acteurs peut aussi s’organiser autour de prestataires logistiques. Je pense en particulier à ce qu’a fait FM Logistic avec son système de Pool qui intègre également la partie GPA. L’idée est de permettre aux « petits industriels » de livrer plus souvent leurs clients en quantités limitées grâce à la mutualisation du transport au départ d’un même site.
D'autres initiatives existent. L'Internet physique est à ce titre particulièrement prometteur. Il s’agit de mettre les stocks au bon endroit à travers l’utilisation d’un réseau de plateformes ouvertes.
Quels sont, selon vous, les facteurs clés dont dépend la réussite de la collaboration ?
Certaines règles générales semblent exister, d’autres sont plus spécifiques aux types de collaboration. Il est alors pertinent de distinguer les cas de collaboration horizontale et verticale.
- Règles générales
Bien entendu, pour que le projet soit un succès dans la durée, chacun doit être gagnant.
Il me semble également important que cette collaboration ne soit pas monnayée, c’est-à-dire qu’il ne s’agisse pas d’une relation dans laquelle un acteur achète des services à un autre acteur.
Ensuite, la collaboration nécessite qu’on y consacre du temps pour échanger sur des indicateurs de performance, vérifier qu'on est bien dans les grilles, se rassurer mutuellement sur le fait que chacun est toujours gagnant. Or, les petits industriels n'ont généralement pas les moyens en ressources pour assumer ce niveau de charge.
D’ailleurs, j’ai pu constater que la relation fonctionne généralement mieux quand les acteurs ont un poids équivalent dans la négociation.
Enfin, il convient de s'assurer de bien encadrer la collaboration par rapport à un cahier des charges et de signer une convention de partenariat qui prévoit notamment les modalités de retour en arrière.
- Collaboration horizontale
Dans le cas d’une collaboration horizontale, l’homogénéité entre les profils des participants est clairement un atout.
Il peut au contraire se révéler compliqué de faire collaborer des acteurs dont les besoins logistiques sont hétérogènes. Il est par exemple difficile de trouver sur un même site les compétences et capacités pour gérer des métiers différents.
De même, lorsque la collaboration concerne des acteurs dont les tailles sont très différentes, les gros peuvent avoir l’impression que les petits profitent à leurs dépens de la masse qu’ils représentent, ce qui engendre inexorablement des tensions.
La collaboration peut également s'appliquer à des entreprises concurrentes, par exemple pour mutualiser leurs flux, définir des cahiers des charges types ou s’entendre sur des KPI sectoriels. Il est alors généralement nécessaire de passer par l’intermédiaire d’un organisme.
Néanmoins, la prise de conscience sur le fait que la supply chain représente un élément de différenciation fort en termes de satisfaction des clients est aujourd’hui telle, qu’il est peut-être désormais devenu plus compliqué de développer une collaboration entre industriels d'une même filière.
Me revient à l’esprit ce que disaient les logisticiens à l’époque où les projets de GPA fleurissaient : "la guerre c'est dans les linéaires et pas dans les camions". Cela était vrai dans une certaine limite. En cas de pénurie de transport, les tensions entre acteurs réapparaissaient logiquement…
- Collaboration verticale
Dans le cas d’une collaboration verticale (avec ses clients ou ses fournisseurs), il peut en particulier s’agir de partager des prévisions pour s'assurer de ne pas avoir de ruptures en amont de la chaîne, y compris d’ailleurs avec les fabricants de packaging.
La difficulté tient au fait qu’on reste toujours dans le cadre d’une relation commerciale. En cas de désaccord sur des négociations tarifaires, le projet risque d’être remis en cause en tant que dommage collatéral. On touche là d’ailleurs à une des limites de la collaboration. Difficile en effet de revenir en arrière, c’est-à-dire d’avoir besoin de réaugmenter les stocks ou de diminuer le niveau de service.
Quid du partage des données ? Constitue-t-il encore un frein ?
Ce qui est sûr, c’est que la question se pose toujours à un moment ou à un autre du projet. Elle sera plus ou moins vite balayée en fonction de la maturité des sociétés et de leur Direction.
Il existe en fait un process lors du démarrage d'un projet collaboratif qui peut s’apparenter à celui de l’adoption d’une nouvelle technologie, sujet que j’ai bien connu avec GS1.
Il convient avant toute chose de partir de ce qu'on veut améliorer, d’estimer ce que cela va rapporter puis d’envisager les actions à mettre en œuvre.
Prenons l’exemple d’un distributeur confronté à des ruptures en linéaires. Il chiffrera le manque à gagner et identifiera les bénéfices de l’atteinte d’un objectif de réduction de ses ruptures. Il réfléchira ensuite à la façon de parvenir à cet objectif.
Pour réduire les ruptures en linéaires, plusieurs axes existent avec des coûts associés. Augmenter les stocks et le personnel en entrepôt et en magasin en est un, mais les coûts seront dissuasifs. Un autre axe est de travailler sur la disponibilité des produits dans les entrepôts en collaborant avec les fournisseurs pour qu'ils prennent en charge le réapprovisionnement. Ils seront dès lors impliqués dans le respect du taux de service magasin.
Pour y parvenir, il conviendra de définir les process à appliquer et les données à partager. Cette question arrivera finalement assez tardivement, une fois les enjeux clairement établis. Cela facilitera donc la prise de décision.
Je souhaite également insister à nouveau sur le fait que la collaboration ne peut être efficace que dans la mesure où elle permet à l’ensemble des acteurs d’en sortir gagnant.
Dans l’exemple évoqué, au-delà des bénéfices pour le distributeur, l'industriel verra son chiffre d'affaires augmenter. Si au passage il récupère des données qui lui permettent d'affiner ses prévisions, il améliorera également sa productivité.
Quelles économies les acteurs peuvent-ils attendre de la mise en place de la collaboration ?
Il m’est difficile de vous faire une réponse générique sur ce point. Tout dépend du type de collaboration.
Autant pour une collaboration de type GPA, nous avons le recul nécessaire pour estimer précisément les gains, autant d’autres types de collaboration sont encore trop récents pour nous permettre de chiffrer avec détail les ROI.
Quels sont dès lors les gains constatés sur la GPA ?
La gestion partagée des approvisionnements est un sujet éprouvé. Nous sommes en mesure d’attester qu’elle permet de réduire de 50% la couverture de stock chez les distributeurs et d’atteindre un taux de service rendu au magasin de plus de 99%.
Quelles solutions en rapport avec la collaboration proposez-vous ?
Nous sommes un acteur historique et incontournable des marchés de l'EDI et de la GPA.
Nous sommes également éditeur d’une plateforme de collaboration nommée Supply Chain Visibility dont l’ambition est de traiter l'ensemble du process d'Order Fulfillment, c’est-à-dire les opérations nécessaires au traitement d’une commande jusqu’à sa livraison au destinataire.
Notre plateforme fournit de la visibilité sur toutes les actions qui permettent de tenir la promesse que nos clients font à leurs propres clients. Elle permet de vérifier la disponibilité des stocks, le lancement d’une vague de préparation, l’expédition de la commande, sa livraison effective, etc.
Tous les types de transport et de flux d'exécution sont connectés à notre solution qu’ils viennent d'une gestion de production, d'un ERP ou d'un WMS.
Nous avons également des connexions avec nombre d’autres solutions spécialisées : les plateformes de tracking maritime et aérien, les stations chargeur éprouvées (TDI et Teliae), etc.
L’idée est de favoriser l’interopérabilité avec les plateformes qui disposent de l'information dont chacun a besoin. Tout cela est rendu possible grâce au développement des nouvelles technologies. Toutes les solutions de tracking sont en effet développées avec des technologies de micro services. Elles ont des API documentés avec des webservices.
Les déploiements se trouvent donc accélérés.
Pour aller plus loin
- Consultez les autres entretiens accordés dans le cadre de ce dossier.
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- Retrouvez dans notre répertoire de solutions SC : les plates-formes collaboratives, les logiciels de visibilité, etc.
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Bio Express :
Isabelle BADOC est titulaire d’un Mastère Spécialisé « Intelligence Marketing » obtenu à HEC en 1997 et diplômée depuis 2015 d’un MBA Global & Domestic Transport Management de l’E.S.T. Elle démarre sa carrière en 1998 chez Influe en tant qu’ingénieur commercial sur la solution de Gestion Partagée des Approvisionnements puis est en charge du développement du marketing produit. En tant que Product Marketing Manager, sa mission consiste à définir la stratégie marketing produit de la plateforme collaborative Generix Supply Chain Hub, de l’animer et de la valoriser auprès des marchés cibles. Elle participe également activement en France aux rencontres de l’Agora Clubs ou de l’ASLOG.
Site Internet de Generix : www.generixgroup.com